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SALUT

Le judaïsme ancien

À de rares exceptions près, « sauveur » est, dans l'Ancien Testament, un titre réservé à Yahvé ; mais le salut que promet ou procure le Dieu sauveur se situe à plusieurs niveaux différents, entre lesquels on discerne une progression du moins spirituel au plus spirituel. Il s'agit d'abord de la préservation ou de la libération de maux ou de dangers temporels, comme on l'a vu dans la religion grecque courante. Cette perspective se fait jour par exemple dans le cantique de gratitude et de confiance attribué à David qui vient d'être délivré de la main de Saül : « Yahvé est mon rocher, ma forteresse et mon libérateur, mon Dieu est mon roc, en lui je m'abrite, mon bouclier, ma corne de salut, ma citadelle et mon refuge, mon sauveur, toi qui me sauves de la violence ! J'invoque Yahvé digne de louanges, et de mes ennemis je suis sauvé ! » (II Sam., xxii, 2-4) ; les hommages à l'adresse du Dieu sauveur, formulés dans les mêmes termes et révélateurs de la même attitude, sont nombreux dans les livres poétiques de la Bible ; ainsi le Psaume XXXI (2-3), également attribué à David : « En toi, Yahvé, je m'abrite : que je ne sois jamais confondu ! Par ta justice délivre-moi ! Tends vers moi ton oreille, hâte-toi de me sauvegarder, sois pour moi un rocher de refuge, un château fort pour me sauver ! »

La doctrine du salut commence à évoluer quand elle concerne, non plus la protection individuelle, mais la sauvegarde du peuple élu tout entier dans les grands dangers et les lourdes épreuves de son histoire ; telle est la conception qui a cours par exemple dans le récit de la traversée de la mer Rouge : « Moïse dit au peuple : « N'ayez pas peur ! Restez sur place et voyez le salut que Yahvé réalisera pour vous aujourd'hui, car les Égyptiens que vous voyez aujourd'hui, vous ne les reverrez jamais plus ! » (Ex., xiv, 13) ; et encore dans les poèmes d'Isaïe relatifs à l'exil de Babylone : « Israël sera sauvé par Yahvé, en un salut perpétuel. Vous ne serez ni honteux, ni confus, à perpétuité » (Is., xlv, 17). À un degré supérieur, la libération procurée par Yahvé met fin au mal spirituel, au péché : « Je vous délivrerai de toutes vos souillures... Vous vous rappellerez vos voies mauvaises et vos actions qui n'étaient pas bonnes, et vous serez saisis de dégoût à votre propre sujet, à cause de vos fautes et de vos abominations » ; ainsi parle Yahvé en Ezéchiel, xxxvi, 29-31.

Matérielles ou déjà spirituelles, les conceptions du salut que l'on vient de voir en Israël ont en commun d'être, à différents niveaux, négatives. Pour rencontrer un contenu positif de la même notion, il faut attendre le salut messianique. Aussi bien la libération de la captivité en Égypte (ce pays passant pour le symbole du péché) et de l'exil babylonien sera-t-elle, au temps du Christ, tenue pour le type du salut apporté par le Messie. Tel est en tout cas le salut que le judaïsme attendait à l'époque de Jésus ; on peut s'en assurer en lisant, au début de l'Évangile de Luc (i, 68-75), le cantique de Zacharie père de Jean-Baptiste : « Béni soit le Seigneur, Dieu d'Israël, de ce qu'il a visité et racheté son peuple, en nous suscitant un puissant sauveur dans la maison de David, son serviteur... Un sauveur qui nous délivre de nos ennemis et de tous ceux qui nous haïssent... selon le serment qu'il fit à Abraham, notre père, de nous donner qu'une fois délivrés de la main de nos ennemis, nous le servions sans crainte, dans la sainteté et la justice, sous son regard, toute notre vie durant. »

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Écrit par

  • : pasteur, président du journal Réforme
  • : directeur de recherche au C.N.R.S., chargé de conférences à l'École pratique des hautes études (IVe section)

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