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SAMBRE (dir. A. Géraud et M. Herpoux)

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La minisérie franco-belge Sambre, écrite par Alice Géraud et Marc Herpoux, réalisée par Jean-Xavier de Lestrade, a été diffusée en 2023 sur France 2. Elle s’inspire du fait divers dit du « violeur de la Sambre » ou « violeur du matin ».

Sambre résulte de la superposition de trois strates : une affaire de viols en série, survenus entre 1988 et 2018, en France et en Belgique ; une enquête journalistique menée par Alice Géraud, dont le récit, Sambre. Radioscopie d’un fait divers, est paru aux éditions Jean-Claude Lattès en janvier 2023 ; une adaptation fictionnelle en six épisodes, due à Alice Géraud, Marc Herpoux et Jean-Xavier de Lestrade. Inspirée de faits réels et soucieuse de rendre hommage aux victimes du violeur, cette fiction puise son authenticité dans le travail de terrain mené par Alice Géraud et dans le souci documentaire affiché depuis ses débuts par Jean-Xavier de Lestrade, combinés à la longue expérience du scénariste Marc Herpoux dans la création et le développement de séries télévisées, des Oubliées (France 3, 2008) à Au-delà des murs (Arte, 2016).

Un récit à plusieurs voix

Sambre retrace les exactions répétées et les trois décennies d’enquête ayant finalement abouti, alors que tout espoir de résolution semblait perdu, à l’arrestation, en 2018, de Dino Scala (rebaptisé Enzo Salina dans la minisérie), ouvrier sociable, entraîneur de football très apprécié et père de famille sans histoire de Pont-sur-Sambre, dans le Nord, à proximité de la frontière belge. Ce prédateur à la double personnalité repérait et agressait ses victimes, parfois mineures, le long de la rivière Sambre, selon un mode opératoire assez constant : muni d’un bonnet et d’une cordelette, il les attaquait par-derrière à l’aube après les avoir suivies, puis les traînait à l’écart en les menaçant d’un couteau, les violait et les laissait en état de choc. Plus de cinquante viols et agressions sexuelles (ou tentatives) lui seront imputés lors du procès qui le condamnera à vingt ans de réclusion criminelle, le 1er juillet 2022.

Devant ce fait divers tombé dans l’oubli à force d’inertie de l’enquête, la question qui se posait aux auteurs de Sambre était la suivante : comment conjuguer une telle histoire avec la forme hybride de la minisérie, entre film et série au long cours ? La réponse, des plus originales dans le contexte télévisuel français, a consisté à articuler chaque épisode autour d’un point de vue différent : celui de Christine, la première victime du « violeur de la Sambre » (interprétée par Alix Poisson), celui d’une jeune juge d’instruction (Pauline Parigot) qui lutte avec opiniâtreté contre l’archaïsme et le paternalisme de l’appareil judiciaire français, celui d’une maire humaniste (Noémie Lvovsky) quisemet au service des victimes en alertant l’opinion publique sur la série de viols.

La seconde moitié de la série diversifie encore les profils des poursuivants. L’épisode 4 implique une enseignante-chercheuse (Clémence Poésy), adepte de la géomatique, une science qui consiste à croiser différentes données liées au territoire. Un commandant spécialisé dans les cold cases (Olivier Gourmet) reprend l’affaire dans l’épisode 5 : sa méticulosité et son don d’écoute contrebalancent l’inconséquence administrative de la police nationale, laquelle finit par contaminer jusqu’à Jean-Pierre Blanchot (Julien Frison), gardien de la paix pourtant pétri de bonnes intentions à son entrée dans la police, lors du premier épisode. Et l’étau se resserre en dernier ressort sur le violeur lui-même (interprété par Jonathan Turnbull), dont l’épisode conclusif relate l’arrestation après trois décennies de traque infructueuse.

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Écrit par

  • : docteur en études cinématographiques et audiovisuelles, chargé de cours à l'université de Lille

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