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SAMIVEL PAUL GAYET-TANCRÈDE dit (1907-1992)

Dessinateur français, peintre, caricaturiste, scénariste, écrivain, Samivel, à qui une exposition a été consacrée (Genève, janv. 1991), est surtout connu par son œuvre d'auteur-illustrateur d'albums pour « petites personnes de cinq à quatre-vingts ans... », selon sa propre expression.

Obligé de vivre à la montagne, le jeune Samivel se livre à des dessins sur le ski et l'alpinisme ; l'éditeur Delagrave sélectionne un choix de croquis humoristiques qui devient Sous l'œil des choucas (1931). Ainsi débute une collaboration entre l'auteur et l'éditeur. Gargantua et Pantagruel, qui paraissent en 1935, inaugurent une veine gaillarde ; les « trognes » rabelaisiennes un peu triviales sont accompagnées de détails cocasses, et déjà une griffe personnelle apparaît. Samivel se décide à écrire ses propres textes, et c'est ainsi que naît la trilogie médiévale inspirée du Roman de Renart : Goupil (1936), Brun l'Ours (1938) et Les Malheurs d'Ysengrin (1939), trois chantefables en vers libres et truculents, mises en images avec l'ambition de plaire à tous. Le choix du grand format se prête à des effets de perspective, à des évocations de paysages grandioses, forêts et campagnes, à des éclairages de clair-obscur, à des scènes cadrées en plongée spectaculaire. Habile conteur, il parvient à créer une dramaturgie par une technique du cadrage qui crée des effets comiques ; il oppose deux tempéraments, celui de Goupil et celui d'Ysengrin, dans un affrontement humoristique où l'énorme tête du loup aux babines retroussées occupe le premier plan, laissant apercevoir le corps fuyant du malin renard, prêt à la parade. Le trait prime sur la couleur juste utilisée pour parfaire l'atmosphère, en aplats légers et monochromes : la dominante bleue ou rose suffit à indiquer les changements d'acteurs ou l'alternance du jour et de la nuit, moment privilégié pour les tours des deux compères. Plus que Félix Lorioux, son aîné qui met lui aussi en scène un petit peuple animal drôle et divertissant, Samivel dote ses héros d'une intelligence inventive qui fait avancer l'histoire à un rythme stimulant. La composition, souple et libre, ménage de grands blancs autour des motifs principaux, et le décor naturel a une fonction dynamique et poétique. Samivel réussit une comédie animale constamment inspirée, où les animaux anthropomorphisés suscitent la sympathie et un élan de solidarité.

Entre-temps, deux albums parus chez l'éditeur Hartmann déploient une veine farfelue qui doit beaucoup aux techniques cinématographiques, depuis le rythme jusqu'à l'emploi du gros plan et des déformations ; il s'agit de Parade des diplodocus et Les Blagueurs de Bagdad (1935), où le sens du gag se retrouve jusque dans le titre. Selon son propre aveu, Samivel s'amuse beaucoup en dessinant. Coupé de Paris pendant la guerre, il réalise quelques albums pour l'éditeur lyonnais I.A.C. : François de France (1940), ou les saisons d'un écolier rural, distille un charme un peu suranné. Il y a davantage de vigueur dans la fantaisie théâtrale La Grande Nuit de Merlin (1943), où s'affrontent les magiciens Viviane et Merlin, ou bien dans La Complainte de la baleine et de M. Jonas (1944), parodie d'une chanson populaire du xixe siècle. La série humoristico-romantique des Dumollet (1946), « aventures surprenantes dédiées aux âmes sensibles », renoue avec le ton burlesque et parodique moins accessible aux enfants, tandis qu'un style plus enfantin se retrouve dans deux petits albums de fables, La Fontaine. 20 fables (1944) et Train de fables (1947).

Deux albums minces qui paraissent chez le Père Castor, au moment de la pénurie de papier, attestent la qualité d'inspiration de Samivel, qui s'accommode des contraintes du petit format ; les contes[...]

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