SARIN
L'identification de l'exposition au gaz sarin
Les signes cliniques restent l'indication majeure de l'exposition à un gaz neurotoxique. Du fait de la spécificité de ceux qui sont présentés par les intoxiqués, l'interrogatoire des médecins sur place et des personnes exposées est une première étape essentielle de l'expertise. Mais elle n'est pas nécessairement conclusive quant à la nature du neurotoxique, une intoxication par le gaz VX ou le tabun donnerait des signes semblables.
La preuve absolue consiste en l'identification de la molécule elle-même. Conservé dans de bonnes conditions, le sarin est relativement stable. Il n'en n'est pas de même dans l'environnement. Cependant, bien que se dissipant assez vite dans l'atmosphère (de quelques minutes à quelques heures selon la météorologie), le gaz ou des traces du liquide peuvent persister plusieurs jours, adsorbés sur les vêtements et par les cheveux en particulier chez l'homme, ainsi que dans le sol surtout à l'abri de l'oxygène et de la lumière. Le plus souvent cependant, il ne reste plus que quelques traces du neurotoxique ou des produits de sa dégradation au moment des prélèvements. Pour déceler et analyser ces éventuelles traces, on dispose des techniques classiques en chimie analytique. Une série de publications de l'année 2013 attestent des progrès spectaculaires accomplis dans la détection des traces de sarin. Dans le cas le plus général, le matériel à analyser est concentré sur une solide poreux conçu pour ce type d'analyses (fibres ou billes), par exemple à partir de l'urine ou d'extraits de fragments de tissus, ou encore de l'air, puis séparé par chromatographie liquide à haute performance (HPLC). Les fractions purifiées (le sarin et ses produits de dégradation caractéristiques) sont identifiées sur la base de leur charge électrique et de leur taille par spectrométrie de masse à haute résolution. Selon les auteurs, le seuil de détection du sarin par cette méthode d'analyse classique est de l'ordre de 10 ppm (environ 10 mg par litre) dans l'échantillon analysé. Diverses améliorations techniques permettent d'abaisser ce seuil d'environ vingt fois. Les produits de dégradation du sarin sont repérables par les mêmes méthodes et contribuent à l'enquête. Enfin, le repérage des types d'impuretés associés au neurotoxique donne des informations sur le procédé de synthèse chimique utilisé et d'une certaine manière sur le lieu de fabrication.
Dans les matériels biologiques comme le sang, il est possible de repérer le produit de l'action toxique, c'est-à-dire le phosphate du sarin fixé sur le groupement hydroxyle (–OH) de l'acétylcholinestérase du système nerveux (adduit). Cela est réalisé par des anticorps spécifiques de l'adduit et une réaction colorée. Ce mode de détection immunochimique est déjà disponible en « kit » sur des languettes de diagnostic et est utilisé pour le suivi de sujets faiblement exposés, à des doses de l'ordre de 10 nanogrammes (10—5 mg) par exemple, qui n'induisent que des signes mineurs. La même méthode de détection associée à des amplificateurs du signal permet la détection des adduits organiques, même conservés dans de mauvaises conditions.
L'arsenal de techniques disponibles est très vaste. La combinaison de différentes méthodes de mesure sur différents échantillons permet ainsi de conclure à l'usage ou au non-usage du sarin, mais également d'autres toxiques, et cela même plusieurs jours après l'exposition.
Ce sont ces techniques que des experts de l'O.N.U. ont utilisées après une utilisation massive du swarin dans la banlieue de Damas en Syrie, à la fin d'août 2013. L'agent neurotoxique a en effet entraîné la mort de plusieurs centaines ou milliers[...]
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- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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JAPON (Le territoire et les hommes) - Histoire
- Écrit par Paul AKAMATSU , Vadime ELISSEEFF , Encyclopædia Universalis , Valérie NIQUET et Céline PAJON
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...de 5 000 morts, met en évidence les dysfonctionnements du gouvernement en matière de gestion des crises graves. En mars de la même année, l'attentat au gaz sarin, qui fait 11 morts et plusieurs milliers de blessés dans le métro de Tōkyō, perpétré par la secte Aum shinrikyo sous l'influence de son gourou...