SCAPIGLIATURA
Le mot scapigliatura (littéralement : « manière d'être échevelé », c'est-à-dire « bohème ») désigne un petit groupe d'artistes lombards et piémontais de la seconde moitié du xixe siècle, et il apparaît pour la première fois dans le titre d'un roman de Cletto Arrighi, publié en 1862.
Sans constituer à proprement parler une école, la scapigliatura peut se définir comme un mouvement en réaction contre le romantisme mineur et sentimental des années cinquante, en poésie, et, dans le domaine de la prose, comme une tentative pour échapper à la tradition du roman historique dont Manzoni avait été le principal représentant.
Arrighi décrit les scapigliati comme de jeunes artistes marginaux et contestataires, violemment anticonformistes et provocants dans leur comportement ; à la fois enthousiastes et désespérés, ils hantaient plus volontiers les bouges et les cafés que les salons littéraires, et tentaient d'imposer un goût plus authentique, moins artificiel et moins provincial. Baudelaire était leur modèle de prédilection, mais, à travers lui, ils remontaient à des sources moins courantes dans la littérature italienne : Edgar Poe, Hoffmann et Heine, Jean-Paul et les « petits » romantiques français, Pétrus Borel et aussi Nerval.
Arrigo Boito, librettiste et musicien, fut l'un des premiers poètes du groupe, avec Giovanni Camerana et surtout Emilio Praga. Mais il y a plus d'originalité et de vigueur chez les prosateurs, et notamment chez I. U. Tarchetti (1841-1869), romancier et nouvelliste hanté par la laideur, la mort et la folie. Son bref roman Fosca est un petit chef-d'œuvre macabre et halluciné. Le plus original, le plus doué de ces écrivains fut sans doute le Milanais Carlo Dossi (1849-1910) dont la virtuosité linguistique (Note Azzurre), recourant à la fois à l'archaïsme et aux néologismes les plus hardis, devait impressionner plus tard un Gadda. Son humour parfois appliqué masque une sensibilité subtile, surtout visible dans les textes autobiographiques (Vita di A. Pisani).
Cet ensemble d'œuvres parfois mineures, mais par trop méconnues, représente en réalité un courant très original, souvent plus européen que proprement italien, dont il faudrait chercher la postérité chez D'Annunzio, parfois, et surtout dans la littérature du second après-guerre.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Mario FUSCO : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification
Média
Autres références
-
LA BOHÈME (G. Puccini), en bref
- Écrit par Christian MERLIN
- 232 mots
- 1 média
La Bohème, opéra de Giacomo Puccini, est créé au Teatro Regio de Turin le 1er février 1896. En 1890, la création de Cavalleria Rusticana de Mascagni marque l'acte de naissance d'un nouveau courant dans l'histoire de l'opéra, le vérisme, pendant musical du naturalisme...
-
DOSSI ALBERTO CARLO PISANI-DOSSI dit CARLO (1849-1910)
- Écrit par Jean-Paul MANGANARO
- 508 mots
Né près de Novare, le 27 mars 1849, Carlo Dossi fonde en 1867 une revue avec d'autres jeunes gens appartenant à la Scapigliatura, le mouvement littéraire qui a le plus influencé le sort des lettres italiennes à la fin du xixe siècle et auquel ont appartenu des écrivains comme Boito, Tarchetti...