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SCHENGEN (ESPACE)

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Les objectifs du droit de Schengen

Le droit de Schengen a deux objectifs : effacer les frontières intérieures entre États et affirmer la réalité de la frontière extérieure de l’espace. La différence de « nature » entre les deux types de frontières devient ainsi cruciale dans le dispositif (CJUE, 19 mars 2019, Arib).

L’effacement des frontières intérieures de l’espace Schengen

La notion de « frontières intérieures » exclut certaines parties du territoire d’États membres de l’espace, tels les territoires d’outre-mer français et néerlandais ou les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla sur la côte marocaine. Elle inclut par ailleurs les frontières des quatre États parties non membres de l’UE (l’Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein), ainsi que celles de trois micro-États tiers enclavés au sein de l’espace (Monaco, Saint-Marin et le Vatican).

L’article 22 du code frontières Schengen pose le « principe » selon lequel les frontières intérieures peuvent être franchies « sans que des vérifications […] soient effectuées sur les personnes, quelle que soit leur nationalité ». Toutefois ce principe général est tempéré de deux façons : les États conservent leurs compétences de police sur leur territoire (contrôle des passeports, des visas…) et ils ont la possibilité de réintroduire temporairement les contrôles à leurs frontières en cas de circonstances exceptionnelles.

Pour ce qui est de l’exercice de ses compétences de police, un État n’a pas la possibilité de leur donner la forme d’une vérification systématique aux frontières. En outre, ces contrôles (qu’ils soient effectués dans les zones frontalières ou en dehors de celles-ci) doivent être soumis par le droit national à des limitations déterminant leur intensité, leur fréquence et leur sélectivité. Notons qu’ils peuvent être opérés par des transporteurs privés, autorisés par un État à vérifier les documents de voyage de leurs clients (CJUE, 13 déc. 2018, Touring Tours und Travel GmbH). Confrontée à la multiplication des opérations de rétablissement du contrôle aux frontières nationales (notamment à partir de la crise migratoire de 2011 et des attentats terroristes de 2015 en France), la Commission européenne a d’ailleurs invité les États à privilégier les contrôles de police intérieurs (recommandation UE de la Commission 2017/820) et proposé d’accroître leur champ d’application dans une proposition de règlement de 2021 (COM/2021/891 final). Cette proposition a débouché, en 2024, sur une révision du code frontières Schengen (règlement UE no 2024/1717). Son nouvel article 23 autorise non seulement les États membres à exercer des compétences de police, mais également d’autres prérogatives de puissance publique, en usant éventuellement des « technologies de contrôle et de surveillance qui sont généralement utilisées sur tout le territoire », dans des buts plus larges qu’antérieurement (lutte contre la propagation d’une maladie infectieuse ou réduction de l’immigration irrégulière, notamment). Par ailleurs, un article 23 bis a été ajouté qui permet le transfert immédiat des ressortissants de pays tiers appréhendés dans la zone transfrontalière intérieure en provenance directe d’un autre État membre. C’était jusqu’alors impossible au regard de la jurisprudence de la Cour de justice, celle-ci imposant qu’une décision de retour soit adoptée et qu’un délai de départ volontaire soit laissé au ressortissant concerné (CJUE, 21 septembre 2023, ADDE e.a. c. ministre de l’Intérieur, C-143/22).

Quant à la possibilité de réintroduire temporairement les contrôles aux frontières nationales « en cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure d’un État membre », elle fait l’objet d’un encadrement qui a beaucoup évolué au gré des révisions du code frontières Schengen[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en droit public, habilitée à diriger des recherches à l'université de Corse, doyenne de la faculté de droit et de science politique de Corse

Classification

Média

À la frontière allemande - crédits : B. Leitner Fotodesign/ Shutterstock

À la frontière allemande