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SCIENCE, notion de

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Éléments de description du travail scientifique

Tel est donc le problème sous-jacent à la définition de la science, et la raison de cette oscillation d'un concept normatif, toujours dogmatique et limitatif, à un concept descriptif, simple désignation d'une pratique sociale dont la prétention à la vérité s'arrête aux frontières d'une communauté. Ce problème ne saurait être rapidement traité. Trois séries de données permettent de le poser dans de bonnes conditions.

On ne saurait surestimer le rôle de la science galiléenne dans la naissance d'une nouvelle représentation de la démarche scientifique, connue sous le titre de science expérimentale. La révolution scientifique, épistémologique et philosophique désignée sous le nom de révolution copernicienne, et à laquelle Galilée a apporté, comme Newton, une contribution décisive, marque en effet les débuts de la science moderne. L'idée de méthode expérimentale, en laquelle se résume le nouveau concept normatif de la science qui se constitue alors, est cependant incomplète et confuse. Elle ne prend pas explicitement en compte la mathématisation du réel qui préside aux expériences de Galilée et laisse dans un flou relatif le statut du recours à l'expérience, statut qui varie considérablement selon celui de l'hypothèse, simple condensé de faits d'observation pour les uns, explication plausible d'un phénomène par ses causes pour les autres.

Par ailleurs, toute analyse de la notion de science doit prendre en compte le caractère historique de la science. Nul plus que Gaston Bachelard, réfléchissant sur la nouveauté essentielle des sciences mathématiques et physiques du début du xxe siècle, n'a insisté sur cette historicité des sciences. Dans La Philosophie du non (1940), il envisage les rapports entre les nouvelles doctrines et les anciennes sous le signe de l'enveloppement : « En fait, tout l'essor de la pensée scientifique depuis un siècle provient de telles généralisations dialectiques avec enveloppement de ce qu'on nie. Ainsi, la géométrie non euclidienne enveloppe la géométrie euclidienne ; la mécanique non newtonienne enveloppe la mécanique newtonienne... ». Le processus historique de production des connaissances scientifiques se caractérise ainsi par son dynamisme, son inventivité et par un mouvement de rectification indéfini des énoncés des problèmes. Ces avancées constantes remettent en question les conceptualisations antérieures. Elles suscitent des reconstructions périodiques de l'édifice entier des sciences, des retours sur les principes admis, des élucidations des présupposés retenus, des méthodes employées. Les scientifiques sont ainsi amenés à s'interroger sur leurs démarches, à les examiner et à les discuter.

Autant dire que les sciences ne sont pas dénuées d'une forte composante réflexive, et que les savants sont logiquement portés à pratiquer la philosophie des sciences. Entre les savants et les philosophes un dialogue est possible et nécessaire, dont les conditions seraient à préciser. Relevons seulement, après Dominique Lecourt, que les physiciens (dans les années 1930) et les biologistes (dans les années 1970) ont contribué de manière décisive à la philosophie des sciences. Outre cette dimension réflexive, et en relation avec elle, les sciences présentent une dimension critique marquée. On ne relève pas assez, lorsqu'on enrichit le concept de science des apports de la sociologie des sciences, ce trait majeur. L'activité scientifique est institutionnalisée ; elle exige des laboratoires, des équipes hiérarchisées, des contrats de recherche, etc. ; elle est aussi un espace d'échanges, de communication ; les résultats et les méthodes sont soumis à la critique, parfois fort âpre, des pairs ; les expériences sont répétées, les protocoles expérimentaux discutés, les hypothèses[...]

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