Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SCIENTOLOGIE

Le rapport au monde extérieur

La scientologie postule que l'homme est bon mais distingue entre l'individu d'élite, le suspect et l'asocial. Chacun voit son éthique définie par sa position sur « l'échelle des conditions ». Toute activité est pour cela systématiquement encadrée, quantifiée, enregistrée. L'objectif n'est pas officiellement de surveiller et de punir, mais d'aider à progresser. L'organisation dispose pour cela d'officiers d'éthique mettant en œuvre plusieurs procédures. (confessions en audition, interrogatoires de sécurité pour les adultes ou les enfants, etc.). L'adepte en « mauvais standing » devient une « source potentielle de trouble » (Potential Trouble Source, P.T.S.). Il existe 34 degrés de sanction, allant de la perte d'un droit à celle d'un bien (grade). Un programme de redressement (Rehabilitation Project Force, R.P.F.) a même été créé en 1973. Selon les scientologues, ces personnes antisociales représenteraient environ 20 p. 100 de la population globale, parmi lesquelles on compterait 2,5 p. 100 de personnes vraiment dangereuses, dites « suppressives » (Suppressive Persons, S.P.). Un cours de détection explique que les « P.T.S. » font des « montagnes russes » (qu'ils sont sujets à des variations de tonus), mais qu'ils se libèrent en se « déconnectant » de S.P. La scientologie a formalisé 72 actes permettant d'identifier ces « suppressifs ». Il n'existerait pas, selon elle, un seul adversaire qui ne soit ou n'ait été par le passé un criminel. La scientologie, accusée par ses détracteurs de pratiquer la « propagande noire », c'est-à-dire de lancer des campagnes de rumeurs, explique qu'elle en est la victime. Elle se heurte cependant à sa propre logique normalisatrice : elle a dû ainsi établir des garde-fous en définissant un pourcentage normal de « P.T.S.-S.P. » dans ses rangs, en mettant en garde ses officiers d'éthique contre les « fausses conditions P.T.S. » et en prononçant des amnisties.

La scientologie peut apparaître d'une certaine manière comme la première technologie religieuse commercialisable mondialement. En ce sens elle ne fait somme toute que systématiser un certain nombre de tendances actuelles (culte de la performance, de la technique, refus de l'État-providence, de la faiblesse, critique de la démocratie, etc.). Elle s'avère très révélatrice du monde contemporain dans la mesure où elle expérimente un mode de sociabilité marchand qui brouille les catégories habituelles de pensée.

— Paul ARIÈS

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : docteur en science politique, chercheur-associé à l'université de Lyon-II-Louis-Lumière

Classification

Média

Ron Hubbard - crédits : Chris Ware/ Hulton Archive/ Getty Images

Ron Hubbard

Autres références

  • SECTES

    • Écrit par et
    • 9 508 mots
    • 1 média
    Le cas de l'Église de scientologie, probablement le mouvement le plus controversé au cours des années 1990, est bien représentatif de cette nouvelle tendance. Cette organisation, née au début des années 1950 aux États-Unis de l'imagination d'un écrivain de science-fiction, par ailleurs remarquable manager,...