SCULPTURE Catégories
Toute activité humaine est marquée à un moment ou à un autre, mais surtout dans la phase initiale de son développement, par une dominante religieuse. La création artistique n'échappe pas à ce schéma général d'évolution. Mais, plus que les autres arts, la sculpture reste imprégnée de ce caractère sacré primordial. Non pas que le sculpteur procède de façon rituelle ; la rude technicité de son art, telle qu'on a pu la deviner plus haut, le porte probablement moins que le peintre aux « secrets » et aux « recettes ». Si la peinture qui capte et emprisonne la forme en la réduisant à deux dimensions peut paraître d'essence magique, l'acte du sculpteur est à la fois plus simple et plus audacieux : il crée la forme, il s'égale au Démiurge qui modela l'homme à partir du limon de la terre. D'où le désir secret d'animer cette forme. Désir qu'illustrent le mythe de Prométhée, la tendre légende de Pygmalion ou le rituel égyptien de « l'ouverture de la bouche » et qui est à l'origine aussi bien de grotesques automates que du Moïse de Michel-Ange.
Mais ce n'est pas seulement la noblesse éminente du geste du sculpteur qui donne à la sculpture son caractère sacré. Trop longtemps, la seule forme digne d'être reproduite a été celle, devinée ou révélée, des dieux (et des rois, leurs reflets temporels) pour que notre mentalité n'en conserve pas quelques traces. La statue, comme le dieu, est éternelle ; l'être humain ou l'animal, adorant ou offrande, ne participent à cette éternité que pour être à jamais présents devant la divinité. L'hostilité de la loi mosaïque et de l'islam, la prudence du christianisme, la longue persistance des attitudes religieuses les plus archaïques ont probablement contribué à la survie de réflexes très anciens : la statue reste l'idole ; statufier équivaut à diviniser. Dans un monde laïcisé, la transposition s'opère et cet honneur ne semble convenable que pour les morts.
Mais, dans la pratique, les œuvres sculptées se répartissent en de nombreuses catégories dont le caractère sacré demeure plus ou moins perceptible. Les dimensions de l'œuvre, le caractère total de la représentation, le choix du matériau, le style enfin ont un rôle sans doute plus déterminant que le sujet lui-même (quand il y en a un) dans le caractère transcendant que l'on est tenté d'attribuer à une sculpture. Pour cerner ces catégories, une double approche est nécessaire. Il faut d'abord déterminer le type selon lequel a été conçu et exécuté chaque objet sculpté. Il faut ensuite identifier le genre auquel, seul ou en groupement avec d'autres objets, se rattache l'objet étudié. La première démarche repose sur l'observation directe et immédiate. La seconde, au contraire, suppose une certaine connaissance du contexte historique et social et l'usage de concepts élaborés par la pratique de la comparaison.
Les types
Très schématiquement, le type d'une sculpture se définit d'abord selon sa localisation : selon qu'elle est intégrée ou non à un ensemble plus vaste, en général de caractère architectural, elle sera qualifiée de sculpture monumentale ou de sculpture indépendante. Il peut aussi se définir en fonction d'un critère intrinsèque : si elle traduit pleinement le volume dans un espace à trois dimensions, elle est qualifiée de ronde-bosse ; si elle est conçue comme un ensemble de saillies se dégageant plus ou moins d'une surface, elle est tenue pour un relief.
En fait, à l'intérieur de cette double alternative, il existe de nombreux cas ambigus. Faut-il considérer comme des sculptures monumentales les statues placées dans les tabernacles de l'église d'Or San Michele à Florence ? Doit-on qualifier de sculpture indépendante le gigantesque Daibutsu de Kamakura[...]
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Écrit par
- Jean-René GABORIT : conservateur général chargé du département des Sculptures, musée du Louvre
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Médias
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