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SCULPTURE Catégories

Les genres

Les genres traités par la sculpture sont théoriquement innombrables puisque à ceux qui lui sont propres elle ajoute, par le biais du relief, tous les genres qui relèvent de la peinture. En fait, certains genres sont restés à l'état de virtualités. Le paysage sculpté ne joue qu'un rôle tout à fait accessoire ; les natures mortes (en relief ou en ronde bosse) sont rares.

Il n'existe pas non plus dans le domaine de la sculpture une hiérarchie des genres dont la doctrine ait été aussi fermement formulée que celle de l'Académie royale à propos de la peinture. Tout au plus peut-on noter, en se fondant sur les morceaux de réception, que le travail du marbre y semblait tenu en plus haute estime que celui du bronze, et que le nu masculin était considéré comme plus propre à démontrer le talent d'un sculpteur que le nu féminin. Il faut souligner aussi la vigueur avec laquelle les académiciens du roi comme ceux de l'académie Saint-Luc défendaient leur rang et leurs prérogatives contre les simples sculpteurs ornemanistes qui avaient l'audace de sculpter des figures.

En fait, l'un des caractères particuliers, sinon exclusifs, de la sculpture, c'est qu'en aucun cas type et genre ne se confondent. Les genres majeurs, en sculpture, correspondent moins à un certain choix du sculpteur et de son client qu'à une certaine fonction sociale, à un choix collectif, appuyé sur une sorte de consensus général : ainsi en est-il de la sculpture sacrée, de la sculpture religieuse, de la sculpture funéraire, de la sculpture commémorative, et même, dans une certaine mesure, du portrait, de la petite sculpture d'appartement et de la sculpture décorative qui, pourtant, sont plus proches par leur fonction des usages réservés à la peinture.

Un même type de sculpture, même isolé de tout contexte, porte ainsi la marque d'un genre déterminé. Un buste n'aura pas le même aspect selon qu'il était destiné à figurer sur un tombeau, dans un lieu public, dans l'intimité d'un appartement ou, à titre de décor, dans un jardin ou sur une façade. Un même genre peut faire appel à des types variés : une sculpture funéraire consiste aussi bien en un relief qu'en une statue, un groupe ou un buste, ou même réunit tous ces types en une composition complexe. Ce qui importe, c'est qu'elle remplisse la fonction que la collectivité attend d'elle. La sculpture, en effet, sauf exception, ne bénéficie pas de l'isolement privilégié que la simple présence d'un cadre parvient à créer autour d'une peinture de chevalet. Son développement spatial la fait participer à l'environnement, et le spectateur ne peut pas l'en abstraire. Avant d'être une œuvre d'art, toute sculpture que ses dimensions ne permettent pas de traiter comme un objet usuel est un acte public, au même titre qu'un édifice architectural, mais son utilité n'est comprise que si son message est perçu et accepté. La destruction des statues royales en 1793, ou la bouteille d'encre lancée sur la Danse de Carpeaux témoignent dans le même sens que le scandale des bien-pensants, croyants ou non, face à la sculpture religieuse de Bernin : la peinture religieuse baroque est acceptée en tant que peinture, la sculpture, elle, est rejetée au nom d'un puritanisme qui ne parvient pas à la dissocier de sa fonction religieuse. Ce caractère public de la sculpture explique peut-être la relative rareté de certains sujets : caricatures, critique des mœurs, erotica. Seules échappent à ce caractère public les sculptures-objets d'art, celles que l'amateur contemple et manie dans le silence de son cabinet : petits bronzes, buis, plaquettes et même parfois médailles (bien que la médaille frappée, par sa large diffusion, ait un caractère éminemment public). C'est là que se reflètent[...]

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Écrit par

  • : conservateur général chargé du département des Sculptures, musée du Louvre

Classification

Médias

Victoire de Samothrace - crédits : Slimewoo/ Shutterstock

Victoire de Samothrace

Grand Buddha Amitabha (<it>Daibutsu</it>) de Kamakura - crédits : E. Graf

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Notre-Dame de Rouen

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