SCYTHES
Dès le xviiie siècle, les Russes se passionnèrent pour les Scythes, et beaucoup d'entre eux voulurent y voir leurs ancêtres. Il apparaît plus plausible, à la lumière des dernières découvertes archéologiques, d'attribuer aux Scythes un rôle prépondérant dans la formation des premières tribus slaves, sans rejeter pour autant le rôle fondamental des autochtones dès avant l'apparition des bâtisseurs de tombes à tumulus ou kourganes. En France, l'intérêt pour les Scythes s'est cristallisé autour de la Grèce et d'Hérodote (env. 480-425 av. J.-C.) qui leur consacre un livre entier de ses Histoires. L'ouvrage de N. Kondakov et I. Tolstoï, Antiquités de la Russie méridionale publié à Saint-Pétersbourg en 1889-1890 et remanié par S. Reinach pour l'édition française de 1891, marque un jalon fondamental de la scythologie. Depuis, une abondante littérature a couvert tous les domaines de l'archéologie scythique, mais aucun ouvrage comparable n'en a fait la synthèse. Les problèmes soulevés sont pourtant de grande importance : outre le rôle des Scythes dans la formation des peuples slaves se dessine la genèse des premières puissances nomades. C'est en effet au début du Ier millénaire avant notre ère que l'extension des troupeaux atteignit un degré qui modifia l'équilibre des populations. Jusqu'alors, l'agriculture et l'élevage fixaient les populations au sol. À l'âge du bronze, l'accroissement de l'élevage entraîna la transhumance et le semi- nomadisme. Vers le ixe siècle avant J.-C., le nomadisme était total et les populations se partagèrent dès lors en deux groupes : les agriculteurs sédentaires et les éleveurs nomades. C'est le début d'un duel qui commença avec les Scythes et se poursuivit avec les Grandes Invasions pour se terminer avec les conquêtes gengiskhanides.
Légendes et origines
Parlant des origines des Scythes, Hérodote raconte les légendes qu'il a lui-même entendues à Olbia au cours du voyage qu'il y fit pour préparer le sixième livre de ses Histoires. L'ancêtre des Scythes serait un certain Targitaos, fils de Zeus et d'une fille du fleuve Borysthène (Dniepr) : les trois fils de ces derniers virent, un jour, tomber du ciel divers objets en or et voulurent s'en saisir ; mais seul le plus jeune y parvint, méritant ainsi la royauté, et c'est de lui que descendraient les Scythes royaux. Suivant une autre légende, Héraklès atteignit la Scythie, alors déserte. Au cours de son sommeil, les juments de son char disparurent ; après de longues recherches, il les retrouva aux mains d'un monstre demi-femme, demi-serpent qui, pour prix du rachat, lui demanda ses faveurs. À son départ, elle le questionna sur le sort qu'il conviendrait de réserver aux trois fils qu'elle attendait de lui. Héraklès lui confia alors un de ses arcs ainsi que son baudrier auquel était suspendue une coupe en or. À celui qui saurait bander l'arc et ceindre le baudrier comme lui reviendrait le pouvoir, aux autres l'exil. Le moment venu, les trois fils, Agathyrse, Gelon et Scythe, subirent l'épreuve ; le dernier l'emporta, donnant son nom à toute sa descendance, à tous ceux qui, dès lors, vécurent en Scythie. Le troisième récit consigné par Hérodote s'écarte de la mythologie grecque et semble mieux convenir aux exigences historiques. Les Scythes seraient venus d'Asie. Chassés par les Massagètes, ils s'installèrent en terre cimmérienne. Toutes les recherches historiques et archéologiques confirment aujourd'hui cette origine. Les terres eurasiatiques furent en effet, au seuil du Ier millénaire avant notre ère, le siège de nombreux mouvements dont les répercussions déclenchèrent des migrations de peuples à la recherche de nouveaux pâturages. Ces mouvements entraînaient la constitution[...]
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Écrit par
- Vadime ELISSEEFF : conservateur en chef du musée Guimet, directeur d'études à l'École pratique des hautes études en sciences sociales
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