SCYTHES
Art et archéologie
Les Scythes aimaient à décorer leurs vêtements, leurs harnachements ou leur mobilier d'un grand nombre d'ornements métalliques, le plus souvent en or ou en bronze. On peut relever dans toutes ces pièces deux styles complémentaires, l'un réaliste, s'attachant à rendre la vie des animaux et celle de scènes particulières, et l'autre ornemental, tendant à fondre des éléments les plus divers en des compositions judicieusement équilibrées. À ces deux aspects s'ajoute aux viie et vie siècles une nette influence des artisans grecs. En dehors de ces facteurs, le problème posé par l'origine et le développement de l'art animalier scythe s'insère dans le vaste domaine de l' art des steppes. Il se présente dès ses débuts comme un art de stylisation avancé, reprenant les formes familières du vieil art ouralien de Gorbunovo, art animalier des forêts, déjà stylisé, et que l'on retrouve au seuil du Ier millénaire dans la culture de Seïma en Russie centrale. Ces images, reliées aux figurations totémiques, ont dû garder leur valeur magique, et chaque motif confère son charme à celui qui le possède. Des carquois portent au centre un œil de faucon ou d'aigle. Au Caucase septentrional, riche en bétail, les images de bovidés, d'ovidés, de cervidés abondent, mais les scènes de combat sont exceptionnelles. Les motifs semblent relever de l'Orient ancien et ne point participer encore à la schématisation scythique. En premier lieu, l'art animalier scythe, comme celui de l'épée trouvée dans le kourgane de Melgunovo, révèle l'existence de rapports étroits avec l'art d'Ourartou et d'Assyrie, plus particulièrement dans le défilé de monstres à têtes de mouton, de lion ou d'aigle. L'art scythe reprend des sujets classiques, mais la composition reste encore héraldique. En revanche, du style scythe se dégage déjà la figure d'un cerf aux bois couchés sur l'échine ou celle des panthères du kourgane d'or de Crimée des viie et vie siècles avant J.-C. et de Kelermès. Au ive siècle avant J.-C., les figures de cervidés sont souvent rendues avec un rare effet de plastique réaliste, alors que les courbes de leurs cornes forment un jeu linéaire. C'est à la même époque qu'apparaissent des animaux entièrement soumis aux torsions géométriques. En outre, l'influence grecque se manifeste, apportée par les artisans ioniens de l'Asie Mineure et du Pont-Euxin, auxquels on doit probablement le vase de Čertomlyk (Tchertomlyk). Cette deuxième vague fut si forte que beaucoup d'archéologues parlent d'un art mixte gréco-scythe. Tantôt l'art grec prédomine, tantôt l'artisan scythe arrive à donner un style particulier à son œuvre. La pluralité ethnique ajoute encore à la difficulté de saisir les caractères originaux, certains Scythes s'hellénisant en Crimée, d'autres gardant les rudes traditions des steppes boisées.
Les découvertes archéologiques n'ont pas seulement exhumé ces richesses de l'art animalier, elles ont permis de regrouper les statues en pierre (baba) portant l'akinakes (épée courte), le rhyton ou le goryte pour les attribuer aux Scythes. Enfin, les découvertes les plus intéressantes sont celles qui ont mis au jour les villes scythes, telle la ville de Kamenskoe sur la rive gauche du Dniepr face à Nikopol. Elle est protégée par trois défenses naturelles et une quatrième constituée par un mur de terre qui clôt la citadelle. Les maisons, qui se trouvent à l'intérieur, sont ovales avec deux ou trois chambres et sont tournées vers le sud ; les murs sont en bois, renforcés d'argile, et des toits en pente reposent sur des piliers. D'autres sont construites entièrement en terre. On a trouvé in situ un outillage abondant, mais aucune œuvre d'art, aucun ornement, ce qui laisse[...]
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Écrit par
- Vadime ELISSEEFF : conservateur en chef du musée Guimet, directeur d'études à l'École pratique des hautes études en sciences sociales
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Médias
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