SÉCESSION (GUERRE DE)
Les opérations militaires
Si le Nord possédait la supériorité matérielle, il ne sut pas en tirer parti, ce qui explique la durée inaccoutumée des opérations, comparable à celle de la Première Guerre mondiale. Dès le départ, le Sud surclasse le Nord sur trois plans. Celui du commandement : ses cadres supérieurs sont excellents, car la tradition militaire était plus profondément ancrée dans le Sud qui eut toujours les meilleurs généraux, Robert Lee, Stonewall Jackson, Van Dorn ; jusqu'à la nomination de Ulysses S. Grant à la tête des armées du Nord, en mars 1864, Lincoln avait cherché, en vain, un chef digne de ce nom. Celui du terrain : la plupart des opérations eurent lieu dans le Sud, et ses unités exploitèrent au mieux leur connaissance de la région. Celui, enfin, de la volonté de vaincre : le Sud avait conscience de lutter pour sa survie, et il y mit un acharnement que ne possédait pas son adversaire.
Sur le plan de la logistique et de l' armement, la guerre de Sécession expérimente un certain nombre de nouveautés, si on la compare à d'autres guerres contemporaines, celles d'Italie ou du Mexique. Elle fut la première où l'on eut recours massivement aux transports ferroviaires, et le télégraphe servit de moyen de transmission pour les unités et d'information pour le commandement. L'adoption du fusil rayé au lieu du fusil lisse augmenta la puissance et la précision du feu et rendit inopérantes les charges de cavalerie. Le chargement des canons par la culasse, l'emploi d'armes à répétition, l'utilisation des mortiers rendirent indispensables de nouvelles formes de défense, tranchées, remblais de sacs de terre... Sur mer aussi, la tactique fut renouvelée par la mise en service des bâtiments à vapeur et des ironclads, les premiers navires cuirassés, illustrée par la rencontre entre le Merrimac, confédéré, et le Monitor, unioniste. Enfin, la guerre de Sécession fut totale, parce qu'elle visait à anéantir complètement l'adversaire et que tous les moyens étaient bons pour parvenir à cette fin, y compris la destruction systématique des villes, des récoltes, des moyens de transport et aussi des vies humaines. On estime à plus de 500 000 le nombre de morts dans les deux camps, dont plus de la moitié décédés des suites de maladies contractées à l'armée ou mal soignées faute d'un service de santé suffisant.
Les opérations proprement dites se déroulèrent sur trois fronts simultanément. Elles débutèrent sur le front dit de l'est, c'est-à-dire en Virginie, dans le Maryland et en Pennsylvanie, chacun des belligérants cherchant à s'emparer de la capitale de l'adversaire, Washington ou Richmond. Mais le terrain était peu propice aux grands mouvements, et des batailles aussi sanglantes que celles de Fredericksburg et surtout de Gettysburg (juill. 1863) ne purent emporter la décision. Sur le front du sud, la prise de La Nouvelle-Orléans par l'amiral Farragut, le 1er mai 1862, eut des conséquences désastreuses pour le Sud, qui fut privé de la libre utilisation du Mississippi, voie essentielle pour son ravitaillement, puisque le réseau ferré était relativement peu développé dans la Confédération. Dès lors, les fédéraux purent faire du front de l'ouest le théâtre principal des opérations, et développer un mouvement pour prendre à revers les confédérés avant d'opérer leur jonction avec leur front de l'est. Après la chute de la forteresse de Vicksburg sur le Mississippi (1er juill. 1863), les troupes fédérales se dirigèrent sur le nœud ferroviaire de Chattanooga, aux confins de l'Alabama, du Tennessee et de la Georgie, d'où partit la marche de Sherman vers la mer, en passant par Atlanta qui tomba le 2 septembre 1864. De Savannah, prise le 21 décembre 1864, Sherman reprit alors la direction du nord, par Columbia,[...]
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Écrit par
- Claude FOHLEN : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris
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