OZAWA SEIJI (1935-2024)
Un passeur entre Orient et Occident
La personnalité de Seiji Ozawa sort du moule classique du chef d'orchestre. Il possède un charisme étonnant, une force de travail et une mémoire qui lui permettent de retenir instantanément les partitions les plus complexes ; il œuvre toujours dans le calme et la sérénité. En répétition, Ozawa parle peu. Il fait jouer les orchestres et sa précision infaillible permet aux interprétations de se mettre en place avec un minimum de commentaires. Sa direction, souple et brillante, redonne aux éléments rythmiques leur place naturelle dans un raffinement de sonorités exemplaire. Ozawa n'a de cesse de donner davantage, de transmettre le message musical sous toutes ses formes, connues et inconnues. Dans ce domaine, il fut le premier véritable passeur entre l'Orient et l'Occident culturels, avec un sens de l'amitié inébranlable, disant de Rostropovitch que c'était son grand frère et considérant Yo-Yo Ma comme son petit frère ; il était également très proche de Martha Argerich ou de Peter Serkin.
Ozawa possède un répertoire excessivement varié où la routine n'a pas sa place et il a fait connaître de nombreux compositeurs japonais en Occident et inversement. Il a imposé dans le monde entier la Turangalîla-Symphonie de Messiaen, la musique de Dutilleux, Lutosławski ou Tōru Takemitsu. Il réussit particulièrement bien les grandes fresques, comme les Gurrelieder de Schönberg, Jeanne d'Arc au bûcher de Honegger, la Quatrième Symphonie de Charles Ives ou la Huitième Symphonie « des Mille » de Mahler, compositeur dont il a dirigé des cycles complets. Il s'est fait le champion de la musique française, de Berlioz à nos jours. C'est peut-être dans le répertoire classique et préromantique qu'il semble le moins à l'aise. Il a créé des œuvres de Ernst Krenek (Perspectives, 1968), Darius Milhaud (Musique pour San Francisco, 1972), Iannis Xenakis (Polla ta Dhina, 1974), György Ligeti (San Francisco Polyphony, 1975), Tristan Murail (Sillages, 1985), John Cage (One Hundred and One, 1989), Hans Werner Henze (Huitième Symphonie, 1993), Alexander Goehr (Colossos of Panic, 1993), Oliver Knussen (Opening Signal, 1994), Henri Dutilleux (The Shadows of Time, 1997 ; Le Temps l'horloge, 2009), Osvaldo Golijov (Last Round, version pour cordes, 2000), Helmut Eder (Musica concertante, 2002), Krzysztof Penderecki (Largo, pour violoncelle et orchestre, avec Mstislav Rostropovitch, 2005), Tōru Takemitsu (NovemberSteps, 1967 ; Crossing, 1970 ; Cassiopeia, 1971 ; Aki[Automne], 1973 ; YumeMado[Dream/Window], 1985 ; From Me Flows What You Call Time, 1990 ; Ceremonial. An Autumn Ode, 1992).
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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