TURQUIE ET SYRIE SÉISMES EN (2023)
Le 6 février 2023, une catastrophe majeure, due à deux forts tremblements de terre, a frappé le sud-est de la Turquie, ainsi que le nord-ouest de la Syrie. Le premier séisme, d’une magnitude de moment (Mw, représentant l'énergie libérée par la rupture sismique) de 7,8, est survenu en pleine nuit, à 4 h 17 du matin heure locale. Un second séisme guère plus faible (Mw de 7,6) a suivi environ neuf heures plus tard. Les autorités turques ont recensé au moins 56 000 victimes décédées et plus de 100 000 blessés, alors qu'en Syrie les chiffres, plus incertains, seraient de l'ordre de 8 500 morts et 15 000 blessés. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a estimé que 15 millions de personnes ont été affectées en Turquie et 11 millions en Syrie. Selon l'ONU, 1,5 million se sont retrouvées sans abri. En Turquie, les provinces de Kahramanmaraş et du Hatay, au sud de ce pays, ont été les plus touchées. Dans cette dernière, la ville d’Antakya (sur le site de l’antique Antioche) a été entièrement ravagée. Ce double séisme destructeur est le plus puissant survenu en Turquie depuis celui d'Erzincan en 1939 (ayant touché l’est du pays), de magnitude comparable. Il est aussi le plus meurtrier des cent dernières années – outrepassant le bilan de celui d'Erzincan qui fut responsable de quelque 33 000 victimes.
Un doublet de séismes sur une limite complexe de plaques tectoniques
L'essentiel de la Turquie constitue la microplaque anatolienne poussée vers l'ouest par l'affrontement entre les plaques arabique et eurasienne. Ce mécanisme d'extrusion latérale d'une microplaque permet d'absorber une partie de la convergence nord-sud entre les deux plaques tectoniques principales. L'autre partie de la convergence est responsable de la mise en place des reliefs du Zagros et des Petit et Grand Caucase, à l'est du plateau anatolien. Deux grandes zones de failles décrochantes – les blocs situés de part et d'autre de la faille géologique se déplaçant horizontalement l'un par rapport à l'autre, sans mouvement vertical relatif – limitent la microplaque anatolienne extrudée : la faille nord-anatolienne (abrégée en NAF par les scientifiques) qui s'étend sur plus de 1 000 kilomètres à sa bordure nord ; la faille est-anatolienne (EAF) qui la sépare de l'Arabie au sud-est. Au sud de la faille est-anatolienne, la faille décrochante du Levant, aussi appelée faille de la mer Morte, permet le déplacement vers le nord de l'Arabie par rapport à la plaque africaine.
Les deux séismes majeurs du 6 février – les scientifiques parlent d'un doublet de séismes – se sont produits le long de la faille est-anatolienne, au niveau de sa partie sud-ouest et de sa jonction avec la faille du Levant. Cette région est un point triple (dit point triple de Maraş) où les trois plaques tectoniques – africaine, arabique et anatolienne – interagissent. Pour cette raison, la faille est-anatolienne y est elle-même complexe, se divisant en plusieurs segments de failles, tous actifs. C’est pour cela que l’on parle souvent du « système de failles est-anatolien ». Les séismes du 6 février ont rompu plusieurs de ces segments.
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Écrit par
- Robin LACASSIN : directeur de recherche au CNRS, Institut de physique du globe de Paris
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Médias