SÉISMES ET SISMOLOGIE Le génie parasismique

Probabilité de dépassement et niveau de performance à atteindre

Les séismes produits par chaque zone source sont indépendants les uns des autres, c'est-à-dire que l'occurrence d'un séisme n'affecte pas celle des séismes dans les autres zones. Par ailleurs, ils sont aussi supposés se produire de façon indépendante dans le temps : la possibilité qu'un séisme survienne ne dépend donc pas du temps écoulé depuis le précédent séisme. Cette hypothèse d'indépendance est classique et puisqu'elle s'applique au séisme, elle s'applique également au mouvement du sol C généré. Pour un site spécifique, la contribution de la zone source i dans l'étude d'aléa, pour un paramètre C à prendre en compte dans un processus de génie parasismique consiste au final à fournir la fréquence (ou le taux d'occurrence λi) avec laquelle une valeur spécifique C* sera dépassée sur un temps t. En considérant l'ensemble des zones sources identifiées, le taux global λ sera la somme des contributions de chaque source indépendante i ayant une fréquence de dépassement de la valeur seuil C*. Il est ainsi défini par : λ[C>C*] = Σ_iλ_Mi∫∫P_j(C>C*|M,R) P(M|R)dMdR, où λ_M est le taux d'occurrence des séismes de la zone source i, P_i(C>C*|M,R) est la probabilité que la valeur C* soit dépassée sur le site, étant donné un séisme de magnitude M à la distance R, et P(M|R) la probabilité qu'un séisme de magnitude M se produise à la distance R.

Cette dernière probabilité se décompose comme le produit des probabilités qu'un séisme de magnitude M se produise dans la zone source i – soit la fonction de densité de probabilité tronquée f_M(M) – et qu'il soit localisé à une distance R du site.

En pratique cela revient à procéder à une triple sommation, sur les magnitudes, les distances et le nombre de zones sources, permettant au final d'obtenir la probabilité de dépassement au site considéré du niveau seuil C*. On obtient alors le taux annuel d'occurrence d'un mouvement C supérieur à C*, soit λ[C>C*]. Cependant, il est préférable en génie parasismique de concevoir des structures devant supporter un niveau de mouvement du sol pouvant se produire durant la durée de vie de l'ouvrage. On parle alors d'un niveau d'aléa ayant un taux d'occurrence annuel donné, ou inversement une période de retour donnée. Il suffit donc de définir cette période de retour.

Puisque l'on considère l'hypothèse d'indépendance des séismes les uns par rapport aux autres, on utilise généralement un modèle de probabilité de type poissonnien pour exprimer de façon probabiliste la distribution des séismes. Puisque la sismicité suit ce modèle de Poisson, le mouvement du sol généré l'est également. Selon ce modèle, la probabilité P qu'un événement se réalise est liée à la fréquence annuelle de dépassement λ[C>C*]et au temps d'exposition (ou à la durée de vie d'un ouvrage) t par la relation : P = 1 — e^—^λ^[^C^>^C^*]^t, ou bien λ[C>C*] = —[ln(1-P)]/t.

Si on définit une probabilité P = 2 p. 100 durant une exposition de l'ouvrage de cinquante ans, cela nous donne une valeur λ[C>C*]qui vaut 0,000 404, soit encore 1/2 475. 2 475 ans est la période de retour. Cinquante ans est généralement la durée de vie standard d'un ouvrage de génie civil. Le terme « période de retour » introduit souvent quelques confusions. Dans l'exemple précédent, cela ne signifie pas que quelqu'un voulant construire une structure pour une durée de dix ans devra considérer un mouvement du sol ayant 2 p. 100 de probabilité de dépassement sur dix ans. En fait, le critère de 2 p. 100 en cinquante ans traduit réellement une fréquence d'occurrence de 1/2 475 par an contre laquelle il est nécessaire de se protéger.[...]

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Philippe GUÉGUEN : docteur en géophysique, Institut des sciences de la Terre, Grenoble

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