SÉLECTION NATURELLE, biologie
Introduite par Charles R. Darwin dans la première édition de L'Origine des espèces (1859), la notion de sélection naturelle (Natural Selection) est définie comme la « préservation des variations favorables dans la lutte pour la vie et le rejet des variations préjudiciables » (preservation of favourable variations and rejection of injurious variations). Cette locution sera remplacée, dans les éditions suivantes, par « la survie du plus apte » (survival of the fittest), selon la suggestion du naturaliste anglais Alfred R. Wallace.
Bien que l'idée d'évolution eût été globalement admise, la sélection naturelle, présentée comme le principal mécanisme à l'œuvre dans l'évolution des formes vivantes, fit scandale : elle ne nécessitait pas l'existence d'un plan d'ensemble de la Création. Un autre débat eut lieu entre les partisans d'une évolution progressive et ceux d'une évolution par sauts (saltationnistes). Ces deux oppositions perdurent aujourd'hui : la première, pour des raisons non scientifiques, chez des personnes dont les convictions interfèrent avec la conception de la biologie ; la seconde, chez les évolutionnistes, sans que cela remette en cause le principe de la sélection naturelle. En effet, l'intervention de cataclysmes géologiques dans l'évolution biologique est assez largement admise et non perçue comme une faille du darwinisme.
La sélection darwinienne
La genèse de la notion de sélection naturelle peut être reconstruite en se fondant sur quelques essais non publiés de Darwin à partir de 1838. Deux influences majeures apparaissent : celle du géologue Charles Lyell et celle de l'économiste Thomas Malthus. Du premier, Darwin retient l'uniformitarisme (les forces agissant actuellement sont celles qui ont agi dans le passé). Du second, il garde l'idée que les populations croissent de façon exponentielle alors que les ressources disponibles n'augmentent guère : il en déduit un « excédent » naturel d'individus qui permet de réaliser un tri favorisant les meilleurs et éliminant les moins bons. La réitération de ce tri sur plusieurs générations, dans des conditions géologiques variant progressivement, mène à l'accumulation de changements biologiques parce que les caractères sont transmissibles, héritables.
Les formulations successives de la théorie de Darwin montrent les difficultés qu'il a pu rencontrer : la reproduction sexuée lui apparaît comme un mécanisme qui mélange les variations et les empêche de s'individualiser. Darwin envisage tout d'abord de donner un rôle important à des variations majeures (appelées sports) qui différencient certains individus. Puis, il imagine des variations continues (par exemple, des renards pourvus de griffes plus ou moins longues), plus subtiles et plus nombreuses, qui déterminent une survie ou une reproduction supérieure chez certains (ceux qui ont des griffes plus longues). Il en résulte une lente modification de la distribution du caractère : on observe toujours des variations de taille des griffes mais, en moyenne, elles sont plus longues.
La sélection sexuelle, définie aussi par Darwin, est un processus distinct de la sélection naturelle. Elle est due à la compétition entre les mâles pour séduire les femelles ou à une préférence des femelles pour un certain type de mâles. Cette compétition cause généralement un dimorphisme sexuel (mâles plus gros, plus forts mais vivant moins longtemps que les femelles). La signification de la préférence des femelles est débattue : elle pourrait n'avoir aucun intérêt particulier, menant à l'évolution de phénotypes arbitraires, ou bien sélectionner des mâles indiquant, par leur morphologie ou leur comportement, leur état de santé et leur « qualité » biologique (héritable). Selon cette hypothèse, les femelles éviteraient ainsi de contracter[...]
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Écrit par
- Bernard GODELLE : agrégé de l'Université, professeur à l'université de Montpellier-II
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