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SÈME, linguistique

Toute langue est construite selon une architecture appelée « double articulation du langage » (dénomination reprise d'André Martinet). Sur le plan de la première articulation se situent les unités dotées de sens, dont les plus petites sont les morphèmes (dits aussi monèmes), ou unités minimales de signification ; sur le plan de la deuxième articulation, le morphème se décompose lui-même en unités dépourvues de sens, les phonèmes, ou unités distinctives.

La tradition structuraliste a, dès les années 1930, proposé une méthode d'identification des phonèmes de chaque langue, fondée sur la technique de la commutation. En français, on dira par exemple que « tu » est constitué des deux phonèmes /t / et /y / (correspondant au « u ») ; et « tu » entre dans un double système d'oppositions : il commute d'une part avec « du » ou « lu » et d'autre part avec « ta » ou « ton ».

L'identification des traits minimaux

Cette même technique, certains structuralistes ont ensuite tenté de l'appliquer à l'analyse sémantique des morphèmes – en particulier des morphèmes lexicaux appelés lexèmes. De même que les phonèmes, caractérisables en termes de traits distinctifs (aperture, nasalité, etc.), permettent d'opposer deux morphèmes différents constituant une paire minimale (comme tu /du ou tu /ta), de même il devrait être possible d'identifier des traits sémantiques oppositifs en opérant des commutations entre lexèmes sur le plan du sens. On travaille ainsi sur des paires minimales de mots dont la différence de sens est réputée tenir à l'opposition entre deux traits sémantiques. Par exemple en français, « aboyer » et « miauler » constituent une paire minimale : ils partagent un trait commun, ils sont une « manifestation sonore buccale » correspondant à « crier », et s'opposent par les traits « émise par le chien » /« émise par le chat » ; mais « aboyer » s'oppose également à « mordre », ce qui permet de dégager un trait commun, « animal », et deux traits différentiels, « activité de la bouche consistant à produire un son » /« activité de la bouche consistant à saisir et serrer avec les dents ».

Ces traits minimaux, sorte d'atomes sémantiques, ont été appelés « sèmes » par des linguistes français comme Bernard Pottier ou Algirdas-Julien Greimas, qui ont ainsi établi les principes de l'analyse sémique, dite aussi analyse componentielle. Dans cette perspective, le sème se définit comme l'unité minimale de signification non susceptible de réalisation indépendante, contrairement au morphème, qui constitue un signe linguistique autonome. Le sème ne se réalise jamais qu'au sein d'une configuration sémantique, c'est-à-dire d'un faisceau de sèmes qui caractérise le sens du morphème et que l'on appelle sémème. Considérons, par exemple, deux morphèmes lexicaux parmi ceux qui participent du champ sémantique des « sièges ». À chacun correspond un sémème constitué par une somme de sèmes :

chaise = « sans bras » + « avec dossier » + « pour asseoir » + « une personne »,

canapé = « avec bras » + « avec dossier » + « pour asseoir » + « plusieurs personnes ».

On appelle « archisémème » l'ensemble des sèmes communs contenu dans le sémème de tous les lexèmes considérés : ici il s'agit du sème « pour asseoir », qui peut être exprimé par le terme générique « siège ».

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