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SÉRIES TÉLÉVISÉES

À chaque nation, son modèle culturel

En raison de son ancienneté, de son volume et de sa capacité à se renouveler, la production américaine a immanquablement influencé les artistes et les diffuseurs des autres nations. Cependant, chaque partie du monde possède sa propre histoire et ses propres logiques de conception. Terre d’accueil de nombreux tournages états-uniens, le Canada vit quelque peu dans l’ombre de son voisin dont il partage la langue et les codes fictionnels. Côté Québec, Radio-Canada propose toutefois des séries francophones et populaires. En septembre 2012, le diffuseur lance le téléroman (feuilleton télévisé) Unité 9 (2012-2019), avec des saisons de vingt-quatre ou vingt-cinq épisodes, qui explore les thèmes de la détention, de la dignité humaine et de la reconstruction de soi en prenant pour fil conducteur l’incarcération d’une mère de famille dans une prison pour femmes.

Au Brésil, les telenovelas occupent une place de choix en raison de leur popularité nationale et de leur propension à s’exporter à travers le monde (hormis en France, où elles n’ont jamais véritablement obtenu de succès). Diffusés quotidiennement, ces épisodes d’une heure environ reprennent la forme du soap opera produit aux États-Unis, mais en donnant lieu à des volumes de production plus réduits. Sur TV Globo, première chaîne brésilienne, quatre à cinq telenovelas sont diffusées chaque jour, du début de l’après-midi à la fin de soirée.

Au Japon, le volume prévaut généralement sur la durée. L’année télévisuelle se divise en quatre : chaque trimestre, de nouveaux dramas sont lancés, ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire de « rattraper » les épisodes précédents. La frontière entre grand et petit écran n’y est pas imperméable. Des cinéastes peuvent très bien proposer des fictions à destination de la télévision, à l’image de Kurosawa Kiyoshi qui réalise Shokuzai en 2012, une minisérie également projetée en salle sous la forme d’un long-métrage en deux parties. De son côté, Kore-eda Hirokazu tourne GoingMy Home (2012), un drama de dix épisodes.

En Corée du Sud, les séries sont plus longues et le rythme de diffusion plus dense : sur les grandes chaînes, deux épisodes sont diffusés chaque semaine sur deux soirées consécutives. Mais, de la même manière, il est aisé de se lancer dans des nouveautés sans avoir besoin de rattraper les saisons précédentes.

La Scandinavie hérite pour sa part d’une longue tradition de littérature policière et de cinéma d’auteur. En termes de séries télévisées, la vague nordique des années 2000 et 2010 est née d’une exigence exprimée par le service public lui-même : sur le modèle britannique de la BBC, les dirigeants des chaînes DR (au Danemark) et SVT (en Suède) n’ont pas hésité à placer les scénaristes au cœur du dispositif créatif, tout en optant pour des sujets plus audacieux et en cherchant le renfort de partenaires étrangers pour coproduire leurs fictions. La stratégie dite de « glocalisation » consiste à s’adresser à un public local tout en ayant en ligne de mire un auditoire étranger. Il en résulte des séries à succès telles que The Killing (2007-2012) et Borgen (2010-2013) au Danemark, Real Humans (2012-2014) en Suède, et The Bridge (2011-2018) entre les deux pays – toutes ont déjà été adaptées aux États-Unis, à l’exception de Borgen. Au-delà du « Nordic Noir », la Scandinavie a su se diversifier en versant dans le politique, la science-fiction et même la dystopie, à l’image de la série norvégienne Occupied qui voit les États-Unis quitter l’OTAN et l’Union européenne s’allier à la Russie pour contraindre la Norvège à maintenir sa production d’hydrocarbures dans un contexte de profonde crise énergétique.

Plus encore, les séries israéliennes ont pu compter sur des adaptations américaines pour mettre en lumière[...]

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Écrit par

  • : docteur en études cinématographiques et audiovisuelles, enseignant contractuel à l'université Paul-Valéry-Montpellier III

Classification

Médias

<em>Urgences</em>, M. Crichton - crédits : Amblin Entertainment/ Urgences/ Bridgeman Images

Urgences, M. Crichton

« Buster » Crabbe dans <it>Flash Gordon</it> - crédits : Universal Pictures

« Buster » Crabbe dans Flash Gordon

<em>Dallas</em>, D. Jacobs - crédits : Everett Collection/ Aurimages

Dallas, D. Jacobs

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