SHEN ZHOU[CHEN TCHEOU](1427-1509)
Shen Zhou – surnom de courtoisie : Qinan ; surnom de fantaisie : Shitian – domine ce courant majeur de la peinture Ming que les critiques devaient appeler par la suite l'« école de Wu », Wu étant l'ancien nom de la préfecture de Suzhou. Shen Zhou n'est pas à proprement parler un novateur ou un fondateur d'école, mais par sa personnalité et par son œuvre, il a cristallisé un ensemble de tendances héritées des Yuan et qui existaient de façon diffuse chez un grand nombre d'artistes dans les premières années de l'époque Ming. L'école de Wu elle-même n'est pas une école au sens strict du mot, car les artistes que l'on range sous cette classification se sont exprimés de manières fort diverses : ce qu'ils avaient en commun (outre le fait que la plupart d'entre eux gravitaient autour de Suzhou) était moins un ensemble de procédés plastiques qu'une certaine attitude intellectuelle, morale et esthétique dont Shen Zhou a fourni l'incarnation la plus puissante et la plus exemplaire.
Le recueillement d'un lettré
Né à Suzhou – qui était devenue une métropole des arts et des lettres –, Shen Zhou appartenait à une illustre famille ; son grand-père était poète, son père et son oncle pratiquaient la peinture avec talent. Il bénéficia d'une éducation classique raffinée, et se trouva dès sa jeunesse en contact avec toute l'élite intellectuelle de la ville. Il se distingua précocement par ses dons littéraires et poétiques. S'il l'avait voulu, il aurait pu faire aisément une brillante carrière de mandarin, mais il refusa de s'engager dans la vie publique. Cette volonté de préserver sa pureté et son indépendance lui valut un surcroît de prestige, tant auprès de ses contemporains que de la postérité. Mais son attitude ne doit pas être confondue avec celle, protestataire, des grands solitaires de l'époque Yuan, ni avec l'isolement farouche de certains individualistes Qing. En tournant le dos aux honneurs officiels, il optait simplement pour le recueillement paisible de l'humaniste qui, à l'abri des soucis vulgaires, entend se consacrer exclusivement au soin de son propre accomplissement spirituel par la lecture, l'étude et la pratique de la poésie et de la peinture. Loin de rompre avec une société qui reconnaissait d'ailleurs ses mérites, il cultiva durant toute sa vie un cercle d'amitiés choisies tant dans les milieux officiels que dans le monde artistique et littéraire.
La force sereine qui se dégage de l'ensemble de son œuvre suggère l'équilibre heureux d'un homme en paix avec lui-même et avec son époque. Ses biographes sont unanimes à vanter ses vertus : piété filiale à l'égard de sa vieille mère, aménité envers ses pairs, modestie et générosité à l'égard des humbles. On retrouve dans la touche ferme et franche de sa peinture la marque d'un esprit puissant et réfléchi, naturellement pondéré et épris d'ordre, refusant l'effet facile et alliant la vigueur à la simplicité.
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Écrit par
- Pierre RYCKMANS
:
reader , Department of Chinese, Australian National University
Classification
Média
Autres références
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CHINOISE CIVILISATION - Les arts
- Écrit par Corinne DEBAINE-FRANCFORT , Daisy LION-GOLDSCHMIDT , Michel NURIDSANY , Madeleine PAUL-DAVID , Michèle PIRAZZOLI-t'SERSTEVENS , Pierre RYCKMANS et Alain THOTE
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