Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SHŌGUN

Abréviation du nom d'une ancienne fonction impériale du Japon, qui devait se dire, en entier, seiitaishōgun, « grand commandant militaire pour la soumission des barbares ». La fonction de shōgun fut créée à titre temporaire, sans doute pour la première fois en 794, en vue de la conquête des territoires du nord de Honshū, dont les habitants n'étaient pas encore soumis au pouvoir impérial. Puis elle semble avoir disparu, après 811. Mais elle fut restaurée en faveur de Minamoto no Yoshinaka, en 1183, lorsque celui-ci entra à Kyōto et que la cour impériale le crut apte à pacifier tout le Japon éprouvé depuis longtemps par des guerres civiles. Pourtant, Yoshinaka se rebella et mourut l'année suivante. Minamoto no Yoritomo, qui avait installé son gouvernement seigneurial à Kamakura, parvint à réunifier le Japon et fut à son tour nommé seiitaishōgun, en 1192.

Dans la terminologie historiographique japonaise courante, le titre de shōgun, sans autre précision, s'applique à partir de 1192 aux titulaires de cette fonction, Toutefois, Minamoto no Yoritomo ne fut pas à même de fonder une dynastie à proprement parler. En effet, si deux de ses fils ont bien été nommés shōgun, ils ont tous deux été assassinés, et, après une vacance du pouvoir pendant laquelle leur mère Masako dirigea les affaires, la présidence effective du gouvernement revint aux shikken (c'est-à-dire aux « mandatés au pouvoir »), tous pris successivement dans la famille Hōjō, dont Masako était originaire. À partir de 1226, des shōgun furent de nouveau nommés, mais leur charge de chef du gouvernement de Kamakura était devenue honorifique, et ils furent recrutés à titre personnel, les deux premiers dans le grand clan des Fujiwara, et les six derniers parmi les princes impériaux. C'est donc au gouvernement de Kamakura que prit source la tradition shogunale : il fut désormais appelé bakufu, c'est-à-dire « le siège de la tente », le quartier général du commandement suprême ; le mot désigna jusqu'en 1867 le gouvernement des shōgun. Par ailleurs, la distinction juridique entre la noblesse civile et la noblesse militaire était établie nettement : sous Kamakura, le shōgun était maître des nobles titulaires de titres impériaux militaires, exerçant ses droits quasiment souverains sur leurs terres, et il était responsable de l'ordre public sur tout le Japon.

Mais, lorsque le bakufu de Kamakura fut renversé en 1333, et que Ashikaga Takauji fut nommé shōgun, le pouvoir de celui-ci allait se modifier sensiblement. Les Ashikaga installèrent leur bakufu à Muromachi, un quartier de Kyōto, et fondèrent une véritable dynastie, puisque de 1336 à 1573 tous les shōgun furent successivement nommés au sein de leur famille. Ayant établi leur siège près de la cour impériale, ils y obtinrent les plus hautes fonctions. Il y eut désormais une certaine ambiguïté dans la distinction entre les deux noblesses : les membres de la noblesse militaire allaient pouvoir cumuler les fonctions de la noblesse civile. En ce qui concerne l'administration provinciale, les Ashikaga systématisèrent la nomination des shugo, gouverneurs militaires, innovée sous Kamakura. Les domaines seigneuriaux, les shōen, appartenant aux nobles des deux catégories, furent de plus en plus accaparés, spoliés, ou du moins gérés par des guerriers subordonnés directement ou indirectement aux shugo : une nouvelle société de type féodal apparaissait. Lorsque Yoshiaki, le dernier shōgun Ashikaga, fut chassé de Kyōto par Oda Nobunaga, son pouvoir était devenu purement nominal.

Ensuite, il n'y eut pas de shōgun, jusqu'à ce que Tokugawa Ieyasu mît fin définitivement aux guerres féodales, de 1600 à 1615. Tokugawa Ieyasu eut soin de recevoir l'hommage des daimyō, possesseurs de grands fiefs, avant de se faire nommer shōgun en 1603. Les Tokugawa maintinrent[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • INSTAURATION DU SHOGUNAT, JAPON

    • Écrit par
    • 229 mots
    • 1 média

    En 1192, Yoritomo, le chef du clan des Minamoto fondé au ixe siècle par un prince de sang impérial, reçoit le titre de sei-i-tai-shogun, « grand commandant militaire pour la soumission des barbares ». Cette promotion inaugure le shogunat, système dans lequel l'empereur n'a plus qu'une autorité...

  • ARAI HAKUSEKI (1657-1725)

    • Écrit par
    • 518 mots

    Savant et homme d'État japonais, conseiller et précepteur des sixième et septième shōgunTokugawa, Ienobu et Ietsugu. Fils d'un modeste officier au service du shōgun, Arai Hakuseki préféra se consacrer aux études ; il vivait dans la pauvreté, lorsque son maître et ami Kinoshita Jun'an...

  • GO-TOBA-TENNŌ (1179-1239) empereur du Japon (1184-1198)

    • Écrit par
    • 333 mots

    Empereur du Japon, né le 6 août 1180 à Kyōto, mort le 28 mars 1239 dans la province d'Oki.

    En septembre 1183, Takahira est porté sur le trône sous le nom de règne Go-Toba-tennō (tenn̄o signifie empereur), par le clan des Minamoto, qui a affirmé sa suprématie militaire sur la majeure...

  • HEIKE MONOGATARI (anonyme) - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 846 mots
    ...tomber dans le même piège de la facilité d'une vie oisive, Yoritomo quitte Kyōto avec ses guerriers et retourne à Kamakura, dans sa province d'origine. Il s'y proclame shōgun, fondant ainsi la tradition de dynastes militaires provinciaux qui exercent la réalité du pouvoir, quand la cour et l'empereur...
  • JAPON (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par , , , et
    • 44 405 mots
    • 52 médias
    ...relativement éloignés de la cour et dont l'empereur lui avait donné l'intendance. En 1192, il reçut, toujours de l'empereur, le titre de généralissime, ou shōgun ; ainsi se trouvait couronnée l'ascension des hommes de guerre, commencée trente ans plus tôt. Le shōgun, dont le titre complet et original...
  • Afficher les 10 références