SIBÉRIE
La conquête russe et l'intégration à l'U.R.S.S.
L'avance russe
Dès le xie siècle, des contacts fréquents avaient lieu entre Russes et Sibériens (cf. russie - Histoire). Au xiie siècle, des marchands de Novgorod cherchaient au-delà de l'Oural fourrures, couteaux et haches, et des tribus ougriennes semblent leur avoir été soumises. Durant tout le xiiie siècle étaient régulièrement lancées des expéditions armées, chargées de ramener marchandises, achats ou butin. Au milieu du xive siècle, des Novgorodiens organisèrent une corporation qui régularisait toutes les transactions. En 1478, Moscou prit le pas sur Novgorod et intensifia les échanges. Au xvie siècle, sur la Petchora (Pečora), s'échelonnaient marchés et relais, tandis que s'ouvraient, au nord, la route maritime et, à l'est, l'accès par la Kama ; les Stroganov, riches marchands, obtinrent des droits spéciaux de lever et d'armer des milices. Ce fut la campagne victorieuse de Iermak, qui triompha du khanat de Sibir, l'envoi de troupes moscovites et l'établissement de places fortes : Tioumen (Tjumen', 1586), Tobolsk (1587), Pelym et Berezov (1593), Sourgout (Surgut, 1594), Verkhotura (1598), Narym (1598), Mangasie (1601) et Tomsk (1604).
À partir du xviie siècle, l'histoire de la Sibérie se confond avec celle de la Russie, puis de l'U.R.S.S. et enfin de la république de Russie. Si la Sibérie occidentale se soumet facilement, il n'en est pas de même du bassin de l'Ienisseï. Là, les Kirghiz tiennent tête longtemps (1640). Entre-temps, les Russes gagnent la vallée de la Lena, fondent Yakoutsk, (Jakutsk, 1629) et atteignent Nertchinsk (Nerčinsk) en 1666. À la fin du xviie siècle, les Russes dominent presque toute la Sibérie, mais, il faut le souligner, très difficilement, car leveurs d'impôts et évangélisateurs ont fort à faire avec des populations pauvres chamanisées ou islamisées ; un peu partout, sporadiquement, éclatent émeutes et insurrections. Khirghiz de l'Ienisseï, Tatars de l'Irtych, Bouriates du Baïkal connaissent de lourdes représailles et des persécutions.
Colonisation et pacification
Du xviiie au xixe siècle, c'est la dernière étape, mais aussi la plus longue, le débouché sur la mer. Les Tchouktches restent pratiquement indépendants jusqu'à la fin du xixe siècle, les Kamtchadales (Kamčadaly) sont en révolte permanente, tandis que le voisinage de la Chine entraîne des difficultés politiques, tranchées par le traité de Nertchinsk (1680) et le tracé des frontières en 1689 sur l'Arghoun (Argun') et la Gorbitza (Gorbica). Presque deux cents ans plus tard, l'annexion russe des territoires de l'Oussouri ratifiée au traité de Pékin (1860) ouvre enfin l'accès à la mer et permet d'atteindre ce qui sera le terminus du Transsibérien (1904).
Au xxe siècle, les territoires sibériens furent l'enjeu de nombreux conflits. Conflit russo-japonais (1905), qui fit reculer l'influence russe au-delà de l'Amour ; révolution de 1905, qui laissa des foyers d'insurrection un peu partout, Tomsk, Krasnoïarsk, Vladivostok. Jusqu'en 1917, l'ordre régna, dur et fragile, tandis que la population se gonflait d'exilés de toutes sortes. En 1918, les troupes tchèques révoltées refluent vers l'est, entraînant la formation de deux gouvernements rebelles, l'un à Omsk, l'autre à Samara. Un gouvernement provisoire d'opposition s'installa à Omsk sous la direction de l'amiral Koltchak (Kolčak). Après de rudes combats de guerre civile, le gouvernement de Koltchak s'effondra (1920). Pendant six ans, des campagnes successives de pacification durent être menées pour triompher des mouvements séparatistes qui agitaient cette immense mosaïque de nationalités. La politique adroite de Lénine sut apaiser[...]
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Écrit par
- Vadime ELISSEEFF : conservateur en chef du musée Guimet, directeur d'études à l'École pratique des hautes études en sciences sociales
- Pascal MARCHAND : professeur à l'université de Lyon-II, chercheur au Centre Magellan, Université de Lyon-III
- Guy MENNESSIER : professeur titulaire de la faculté des sciences de l'université de Picardie
Classification
Médias
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