SICILE
Des origines à l'invasion normande
La Sicile fut peuplée tardivement aux temps préhistoriques. L'agriculture et l'élevage furent reçus de l'Orient à la fin du Ve millénaire. C'est de là aussi que vint plus tard l'usage des métaux, et, au IIe millénaire, celui du bronze : la Sicile était alors une étape sur la route de l'étain venu du nord. Les fouilles livrent de nombreux objets mycéniens, prouvant l'existence d'importants échanges commerciaux avec le monde égéen ; le périple d'Ulysse dans les eaux siciliennes, selon L'Odyssée, garde le souvenir de ces lointaines navigations. Les populations se mettent alors en place : l'Est est peuplé par les Sicules, Indo-Européens proches des Latins ; à l'ouest se maintiennent les Sicanes et les Elymes, descendants de peuples plus anciennement installés.
Les marchands phéniciens fréquentèrent les côtes siciliennes dès la fin du IIe millénaire et ils y fondèrent des comptoirs au ixe siècle. À l'arrivée des Grecs, ils se replièrent dans l'Ouest, à Motyé, à Solonte et Palerme. Carthage leur imposa ensuite son autorité et s'implanta solidement dans la pointe occidentale de l'île ; à partir du vie siècle, elle joua un rôle très actif dans la vie économique et politique sicilienne.
Dans la première moitié du viiie siècle, les contacts furent renoués entre la Sicile et le monde grec qui connaissait alors une grave crise politique et sociale. Cadets sans terres, hors-la-loi et vaincus allaient gagner les pays du Couchant, qui leur apparaissaient comme un fabuleux Eldorado. Le mouvement de colonisation, qui débuta vers 760, se poursuivit jusqu'au milieu du vie siècle. D'abord spontané, il fut, à partir de 650, organisé par les cités recherchant matières premières et débouchés pour leurs produits. En 757, des Ioniens d'Eubée s'installèrent à Naxos, sur la côte orientale ; ils s'assurèrent ensuite le contrôle du détroit de Messine ; puis vinrent des Doriens : les Mégariens ; les Corinthiens qui fondèrent Syracuse en 733 ; les Rhodiens fondant Gela. Ces premières cités grecques de Sicile créèrent à leur tour des colonies dans l'île dont les côtes furent progressivement frangées d'établissements hellènes.
L'âge d'or de la Sicile grecque (VIe-Ve siècle av. J.-C.)
Les colons apportaient leurs dieux, leur langue, les lois de leur patrie, refoulant ou dominant les indigènes. Ils ne gardèrent que des liens très lâches avec leurs métropoles. La fécondité de la terre sicilienne fut à l'origine d'une prospérité éclatante, essentiellement fondée sur l'agriculture. Les cités eurent un régime aristocratique, la terre et la politique étant le quasi-monopole des héritiers des premiers colons. Cependant se créaient des classes d'artisans et de commerçants, désireux de parvenir à la puissance politique.
En cas de crise grave, il arrivait que, comme dans la vieille Grèce, un tyran s'imposât ; le plus célèbre, aussi cruel qu'énergique, fut Phalaris d'Agrigente (vers 550).
Les difficultés ne manquaient pas. Comme en Grèce, les cités s'affrontaient dans de nombreuses guerres. Les Sicules demeuraient toujours redoutables. Carthage, surtout, faisait de la Sicile un des plus importants bastions de son empire et menaçait gravement les Grecs. Ces dangers permirent, au ve siècle, l'installation d'une nouvelle génération de tyrans. Les quatre Déinoménides, établis à Gela et à Syracuse, furent un moment les plus puissants dynastes du monde grec et sauvèrent l'hellénisme occidental. Par sa victoire d'Himère (480), Gélon écarta pour un siècle le danger carthaginois ; son frère Hiéron (478-466) détruisit la flotte étrusque devant Cumes. Leurs succès mêmes rendirent les tyrans inutiles : à partir de 450[...]
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Écrit par
- Maurice AYMARD : agrégé de l'Université, lecteur à l'université de Naples, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, administrateur de la Maison des sciences de l'homme
- Michel GRAS : directeur scientifique adjoint au département des sciences de l'homme et de la société du C.N.R.S.
- Claude LEPELLEY : chargé d'enseignement à l'université de Lille
- Jean-Marie MARTIN : maître assistant à l'université de Paris-I
- Pierre-Yves PÉCHOUX : maître assistant à l'université de Toulouse-Le-Mirail, expert de l'Organisation des Nations unies à Chypre
Classification
Médias
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