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SIMA XIANGRU[SSEU-MA SIANG-JOU](env. 179-117 av. J.-C.)

Poète et courtisan

Les œuvres attribuées à Sima Xiangru que l'on peut considérer comme authentiques, qu'elles soient en prose ou dans cette forme mi-prosaïque mi-versifiée qu'on appelle le fu, sont tout entières contenues dans le Shi ji de Sima Qian, composé quelques dizaines d'années après la mort du poète. Il est certain cependant qu'on se trouve devant un choix de textes, de ceux qui ont paru à son premier biographe refléter le mieux la personnalité d'un écrivain dont la réputation fut très grande de son vivant.

On y découvre quatre textes en prose, écrits dans une langue à la fois simple et noble, sans recherche autre que celle d'une certaine cadence oratoire (que la langue chinoise écrite comporte naturellement). Qu'ils soient adressés à l'empereur ou à ses sujets appelés au service de la grandeur chinoise, c'est-à-dire à participer à l'œuvre d'extension de l'Empire vers le sud-ouest, ces textes sont d'inspiration nettement confucéenne. Il s'agit de rappeler à l'un et aux autres leurs devoirs de prince et de sujets. Le Traité sur les sacrifices feng et shan est spécialement intéressant. Par sa forme tout d'abord, car il contient toute une partie en tétramètres réguliers, qui rappellent la poésie la plus ancienne, celle du Shi jing, dont la prosodie était alors presque entièrement tombée en désuétude ; par son sujet aussi, car c'est un hymne magnifique à la gloire de l'empereur. Hymne d'un courtisan bien entendu, mais aussi d'un homme qui avait le vif sentiment de la grandeur d'un règne qui fut parmi les plus éclatants de l'histoire de la Chine.

Les fu de Sima Xiangru sont la partie de son œuvre qui est la plus réputée, malgré leur extrême difficulté. Dans l'article sur le fu

(cf. fu), on peut voir comment Sima Xiangru fut l'initiateur de ce genre ; il en fut aussi le maître, bien qu'il ne reste de lui que trois fu, l'un cependant ayant été composé à partir d'une œuvre antérieure, écrite à la cour du roi de Liang, à laquelle fut ajoutée une seconde partie pour faire de l'ensemble un long poème à la gloire des chasses et des palais de l'empereur. Le cadre du poème est constitué par une discussion entre trois personnages : les deux premiers représentent des royaumes de la Chine ancienne et le troisième l'empereur ; chacun de ces personnages porte un nom tel que « monsieur Imaginaire », etc., indiquant que le poème ne cherche pas à se limiter à la réalité ; bien entendu, c'est le représentant de l'empereur qui fera le discours le plus extravagant, pour manifester la supériorité de son maître. À l'intérieur d'un ensemble en prose, chaque discours est composé d'un poème ou d'une série de poèmes. Les poèmes forment une description ou une narration qui veut être classificatoire plutôt que soucieuse de réalisme. Mais l'irréalisme se révèle plus encore dans le choix d'un vocabulaire plein de recherche, où le poète montre ses talents de lexicographe et surtout son sens de la musicalité de la phrase, par l'abondance d'un vocabulaire plein d'allitérations ou de rimes intérieures. La beauté de cette langue, qu'il nous est évidemment difficile d'apprécier, semble avoir exercé une sorte d'envoûtement, comme en témoignent les éloges qu'on en lit dans les textes anciens et les nombreuses imitations qui en furent faites. Malgré les critiques des dépenses exagérées de l'empereur, sur quoi se termine le Fu de la chasse impériale pour donner une note confucéenne après des discours qui étaient loin du « juste milieu » confucéen, cette poésie relève nettement de la littérature de courtisan. Le Fu du surhomme, poème inspiré des Chu ci sur la randonnée mystique dans le monde des phénomènes[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-VII, directeur de l'Institut des hautes études chinoises au Collège de France

Classification

Autres références

  • FU [FOU], genre littéraire chinois

    • Écrit par
    • 1 596 mots
    Le principal auteur de fu des Han et le véritable initiateur du genre est Sima Xiangru (179 env.-117), dont l'importance mérite que lui soit consacrée une étude spéciale. Son œuvre majeure, qui sera imitée par ses successeurs, est une description hyperbolique de la magnificence du parc impérial et des...