HANTAÏ SIMON (1922-2008)
Né à Bia en Hongrie le 7 décembre 1922, Simon Hantaï se forme à l'école des beaux-arts de Budapest (1942-1948), puis quitte son pays tombé sous la domination communiste. Après avoir séjourné en Italie, il s'installe à Paris en 1949 et rejoint le mouvement surréaliste. Les œuvres qu'il présente en 1953 à la galerie dont André Breton assure la direction artistique, À l'étoile scellée, révèlent l'emploi de techniques variées – collage, frottage, graffiti et, déjà, pliage – et de matériaux hétéroclites – os et crânes d'animaux, arêtes de poissons, miroirs, journaux –, qui donnent forme à un bestiaire de violentes créatures. Lorsqu'il découvre la peinture expressionniste abstraite américaine, celle de Jackson Pollock en particulier, et qu'il fait la connaissance de Jean Fournier, directeur de la galerie Kléber à Paris, Hantaï se rapproche de l'abstraction lyrique parisienne. Sa participation à l'exposition Alice in Wonderland à la galerie Kléber (1955) marque publiquement la rupture avec le surréalisme, et son exposition personnelle Sexe-Prime. Hommage à Jean-Pierre Brisset, au sein de la même galerie (1956), montre l'évolution de son œuvre vers le langage abstrait suivant une écriture gestuelle plus affirmée : mise à nu par les opérations de grattage et de frottage, la peinture laisse apparaître des signes en creux sur un fond coloré. L'artiste expose en 1957 avec Georges Mathieu (Les Cérémonies commémoratives de la deuxième condamnation de Siger de Brabant, galerie Kléber) et réalise une série de peintures « théologiques » (1958) qui font polémique.
Après avoir mené à bien en 365 jours la monumentale Peinture (Écriture rose) (1958-1959, Centre Georges-Pompidou, Paris), il renonce à la figuration, abandonne la toile montée sur châssis et adopte « le pliage comme méthode », souvenir, notamment, de l'art populaire hongrois. Les actions neutres de pliage, froissage, nouage, peinture à l'aveugle des parties convexes de la toile puis dépliage se substituent au geste pictural « traditionnel ». L'espace vierge de la peinture se recouvre d'empreintes de couleurs selon un mode aléatoire qui se fait plus complexe avec les années : les Mariales (1960-1966) résultent d'un pliage serré, multiple et irrégulier. Les Meuns (1967-1968) – l'artiste s'installe dans la ville de Meun en 1966, année durant laquelle il cesse de peindre – sont le fruit de plis plus larges et de nœuds qui laissent percer le blanc au centre de la toile. Peu après sa visite de la chapelle de Vence décorée par Matisse, Hantaï réalise la série des Études (1969), monochromes qui systématisent le principe de remplissage all-over. Les Blancs (1973-1974) réintroduisent la polychromie et les Tabulas (1972-1976) sont issues d'un quadrillage « anexact » (Gilles Deleuze) de la surface de la toile, chaque élément de la grille présentant des singularités. Le monochrome, le nouage et le travail à l'acrylique sont privilégiés dès 1973. Peu après l'exposition que lui consacre le Musée national d'art moderne, l'artiste marque une seconde pause, de 1976 à 1979, puis revient s'installer à Paris et reprend la série des Tabulas (1980-1982) : la couleur matissienne se restreint, le quadrillage s'élargit et le format de la toile se monumentalise.
Alors que son influence sur la jeune scène française est attestée – le collectif B.M.P.T. (Buren-Mosset-Parmentier-Toroni) et le groupe Supports/Surfaces, réuni autour de Vincent Bioulès, considèrent l'œuvre et le positionnement de Hantaï à l'égard des institutions et du marché de l'art comme un modèle de référence –, le C.A.P.C. de Bordeaux lui consacre une rétrospective en 1981, et l'artiste représente la France à la Biennale de Venise en 1982. Volontairement en marge dès ses débuts[...]
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Écrit par
- Cécile GODEFROY : enseignante, chercheuse associée, historienne de l'art
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Autres références
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SUPPORTS / SURFACES
- Écrit par Didier SEMIN
- 2 447 mots
...parisien qui montrait aussi James Bishop, Sam Francis et Simon Hantaï, et qui joua un rôle clé dans le renouvellement en France de la peinture abstraite. Hantaï était d'ailleurs un des rares artistes non américains, avec Pierre Soulages et Jean Degottex, à jouir alors d’un réel prestige auprès de...