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BERRIAU SIMONE (1896-1984)

Chanteuse lyrique, comédienne, productrice de films, promoteur immobilier à l'occasion, Simone Berriau fut pendant des années un « personnage » parisien. Mais c'est avant tout comme directrice du Théâtre-Antoine (à partir de 1943) qu'elle passera à la postérité, pour avoir révélé au public Jean-Paul Sartre dramaturge et avoir su pressentir en Peter Brook et Claude Régy deux metteurs en scène importants.

Avec un rare bonheur et une prodigieuse intuition, Simone Berriau, en se jouant des modes, n'a jamais craint la difficulté, montant Sartre, Camus, Tennessee Williams et Pinter dans un théâtre qu'elle aurait pu vouer exclusivement au répertoire de boulevard. Ce n'est pas un des moindres paradoxes d'une existence riche en surprises.

Née à Touques (Calvados), Simone Bossis, jeune Bretonne romanesque, passe son adolescence au Maroc, pays dans lequel elle gardera des attaches, grâce à l'amitié du pacha de Marrakech. Veuve à dix-huit ans du colonel Berriau, compagnon de Lyautey, et mère de la future comédienne Héléna Bossis, Simone Berriau regagne la France.

Travaillant le chant avec Rose Caron et Germaine Martinelli, elle entre dans la troupe de l'Opéra-Comique, dont elle fera partie pendant treize ans. Dotée d'un physique agréable et d'une bonne voix naturelle de soprano, Simone Berriau, conseillée par le chef d'orchestre Albert Wolff, débute salle Favart dans le rôle de Micaëla de Carmen, avant d'interpréter Le Roi d'Ys, L'Heure espagnole et Mme Butterfly. Dans Pelléas et Mélisande, elle se montre admirable et s'attire les compliments de Maurice Maeterlinck. Un accident vocal mettra fin, en 1935, à la carrière lyrique de Simone Berriau, qui a déjà commencé à s'intéresser au cinéma, avec Ciboulette, réalisé en 1933 par Claude Autant-Lara. Simone Berriau produit et interprète Itto de Jean Benoît-Lévy et Marie Epstein (1934), Divine (1935, d'après L'Envers du music-hall, de sa grande amie Colette), réalisé par Max Ophüls, tout comme La Tendre Ennemie (1936). On la voit aussi dans la plupart des brillantes comédies écrites pour l'écran par Yves Mirande, comme À nous deux, madame la Vie (1936), Café de Paris (1938), Derrière la façade (1939), Elles étaient douze femmes et Paris-New York (1940).

Mais le septième art ne satisfait par Simone Berriau, qui rachète en 1943 le Théâtre-Antoine et inaugure sa direction par un hommage à André Antoine confié à Sacha Guitry.

Faisant preuve d'audace, Simone Berriau monte, à la Libération, deux courtes pièces de Jean-Paul Sartre, refusées par tous les directeurs de théâtres parisiens : Morts sans sépulture, et La P... respectueuse. Sartre lui confiera par la suite Les Mains sales (que Simone Berriau portera elle-même à l'écran, en collaboration avec Fernand Rivers, en 1951), Le Diable et le Bon Dieu (mise en scène de Louis Jouvet, avec Pierre Brasseur et Maria Casarès), et Nekrassov.

Souvent obligée, à la suite d'entreprises courageuses mais peu rentables, de renflouer les caisses de son théâtre, Simone Berriau opte pour un « boulevard » de qualité : reprises de La main passe de Feydeau, du Petit Café de Tristan Bernard (avec Bernard Blier et Marie Dubas), de Fric-frac de Bourdet (avec Michel Simon), de Gigi de Colette (avec Gaby Morlay et Françoise Dorléac), qui alternent avec les créations des Compagnons de la Marjolaine et de L'Idiote de Marcel Achard (avec Annie Girardot), de L'Heure éblouissante et d'Anastasia (avec Juliette Gréco), d'Un sale égoïste de Françoise Dorin (avec Paul Meurisse).

Simone Berriau peut ainsi, entre deux spectacles souriants, faire découvrir Tennessee Williams, avec Un tramway nommé Désir (joué au théâtre Édouard-VII par Arletty), et La Chatte sur un toit brûlant, avec Jeanne Moreau. Pour cette seconde pièce, comme pour Vu du pont[...]

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