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Implications de la découverte du site de Cabrières

Avant la découverte du gisement de Cabrières, seuls deux Lagerstätten avaient livré des faunes marines riches et diversifiées datant de l'Ordovicien : les sites des Fezouata (décrit en 2010) et de Liexi (Chine, publication datant de 2022), tous les deux légèrement plus anciens (respectivement environ 480 et 475 millions d’années) que celui de la Montagne Noire. Les fossiles de Cabrières confirment les tendances observées dans ces deux Lagerstätten et, en particulier, la coexistence auprès de formes typiques de l'Ordovicien (céphalopodes orthocônes, crinoïdes, graptolites, ostracodes) de très nombreuses espèces considérées jusqu'alors comme caractéristiques des Lagerstätten plus anciens, d’âge cambrien (démosponges, halkiériides, marrellomorphes, radiodontes). Cette observation contribue donc à remettre en cause le paradigme selon lequel la diversification des animaux se serait faite en deux étapes successives et distinctes : l'explosion cambrienne, puis la grande biodiversification ordovicienne. La comparaison, à préservation équivalente, d'assemblages provenant de Lagerstätten cambriens et ordoviciens indique, au contraire, l'existence d'une seule grande phase de diversification plus ou moins ininterrompue du début du Cambrien à la fin de l'Ordovicien.

À l'Ordovicien inférieur, la région de Cabrières était à proximité immédiate du pôle Sud, en bordure du continent Gondwana. La très forte diversité de l'assemblage qui y a été découvert tout comme celle, encore plus élevée, décrite dans le Lagerstätte des Fezouata (alors également situé à des latitudes élevées dans l'hémisphère Sud) contrastent fortement avec celle, très faible, du gisement de Liexi, alors que le sud de la Chine se trouvait pourtant en zone tropicale… De nos jours, la plupart des zones riches en biodiversité sont situées en zone tropicale (Asie du Sud-Est, mer des Caraïbes), et cette biodiversité, d'une manière assez générale, décroît en direction des pôles. La configuration inverse observée à l'Ordovicien inférieur pourrait s'expliquer par l'existence de températures moyennes supérieures de 10 à 12 °C à celles enregistrées actuellement. Dans un tel contexte climatique, les faunes auraient migré des tropiques vers les hautes latitudes, afin d'y trouver des conditions environnementales plus favorables à leur développement. L'Ordovicien serait caractérisé par un refroidissement lent et progressif qui aurait grandement favorisé la diversification dans tous les océans, avant de s'achever par une glaciation, courte et sévère, à l'origine d'une importante crise biologique.

— Bertrand LEFEBVRE

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Écrit par

  • : paléontologue, chargé de recherche au CNRS, Laboratoire de géologie de Lyon Terre, planètes et environnement (LGLTPE), université Claude Bernard Lyon 1

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