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SOCINIENS

Le groupe religieux des sociniens, qui s'était constitué en Pologne vers le milieu du xvie siècle et qui allait trouver en 1579 son théologien en la personne du Siennois Fausto Sozzini (Faustus Socinus, 1539-1604), est souvent présenté comme l'origine et la composante essentielle du mouvement unitarien ou antitrinitaire. En fait, il ne constitue qu'un des moments — très important, il est vrai — de ce courant doctrinal qui privilégie l'unité de personne en Dieu (la « monarchie divine »), ainsi que la nature humaine de Jésus-Christ, et qui remonte sous sa forme moderne (c'est-à-dire bien après l'arianisme) à Michel Servet lui-même, à des anabaptistes rhénans, à des humanistes italiens. C'est d'ailleurs l'exécution de Michel Servet qui avait amené, en 1553, à s'en prendre à la doctrine de la Trinité l'oncle de Fausto, Lelio Sozzini (Laelius Socinus, 1525-1562), juriste par tradition familiale, puis bibliste et théologien, qui eut maille à partir avec Heinrich Bullinger, le successeur de Zwingli à Zurich.

Venu s'installer en Pologne, où son oncle Lelio avait séjourné et exercé son influence avec d'autres Italiens antitrinitaires, Fausto devint le théologien le plus important du groupe qui, en 1565, s'y était organisé, en marge de l'Église réformée, sous le nom d'« Union des frères (Unitas fratrum) de Pologne et de Lituanie qui ont rejeté la Trinité » ou de « petite Église polonaise ». Il travailla à le dégager des formes autochtones d'anabaptisme qui le caractérisaient et à élaborer le Catéchisme de Raków, qui allait paraître un an après sa mort. Bénéficiant d'un contexte de tolérance, il avait fait du gros bourg polonais de Raków un centre intellectuel important qui produisit de nombreux érudits et où les unitariens avaient leurs écoles et leurs imprimeries, tandis qu'ils se répandaient aussi en Hongrie et en Transylvanie.

Mais, avec la Contre-Réforme, la persécution devait s'abattre sur les sociniens polonais : leur université fut fermée en 1638 et, en 1658, la diète les obligea à choisir entre la conversion au catholicisme et l'exil. Ils émigrèrent en Prusse, en Transylvanie, en France et en Hollande. Leur influence allait se retrouver chez les unitariens de Grande-Bretagne et des États-Unis, dans des communautés au credo réduit et de type congrégationaliste.

— Charles BALADIER

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  • : éditeur en philosophie, histoire des religions, sciences humaines; ancien élève titulaire de l'École pratique des hautes études

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