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SŒUR ANNE

Un des personnages les plus célèbres du recueil des Contes de ma mère l'Oye (1697) bien qu'il n'y joue qu'un rôle modeste. C'est la belle-sœur de la Barbe-Bleue. Elle guette sur le haut de la tour du château l'arrivée salvatrice de ses frères. Sœur Anne est très souvent invoquée et citée à cause de l'échange angoissé de formulettes organisées autour de rimes internes : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? [...] Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie. »

Dans le conte de voie orale no 311-312 (classification Aarne-Thompson), Barbe-Bleue épouse trois ou sept sœurs et les égorge toutes, à l'exception de la dernière qui ressuscite souvent les autres. Dans le recueil adapté par Pierre et Charles Perrault, Anne n'est pas parente des épouses enfermées dans le cabinet bas, mais son statut familial présente d'étranges particularités. Elle est « parfaitement belle » comme sa sœur, dont nous ignorerons toujours le prénom, et également convoitée par le sinistre prétendant. Avant de prendre une décision, les deux sœurs « se le renvoient l'une à l'autre ». Sœur Anne réside dans le château de sa sœur lorsque la Barbe-Bleue part en voyage et lorsqu'il revient. Elle est nécessairement au courant de l'excès de curiosité de sa sœur et du châtiment qu'elle va subir. Elle assiste aux préparatifs du meurtre, mais l'époux sanguinaire ne semble pas s'inquiéter de la présence de ce témoin. L'ambiguïté est encore accrue par la position respective des deux sœurs par rapport à l'assassin. Sœur Anne regarde au loin, mais la femme de la Barbe-Bleue est, elle aussi, dans la tour puisque son mari crie avec insistance : « Descends donc vite [...] ou je monterai là-haut » (sic). Il pourrait donc s'agir — en tout cas dans l'esprit des adaptateurs — de jumelles, tout aussi inséparables que le couple des frères libérateurs.

— Marc SORIANO

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Écrit par

  • : docteur ès lettres et sciences humaines, professeur émérite à l'université de Paris-VII-Jussieu

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