SOIF
Les récepteurs internes et les centres dipsiques
L 'existence du stimulus osmotique de la soif implique qu'il existe, quelque part dans l'organisme, des cellules spécialisées, les « osmocepteurs », qui répondent soit à la réduction de leur propre volume, soit à l'élévation de la pression osmotique effective de leur environnement, et transmettent cette information au système nerveux central. La présence de récepteurs internes répondant à l'élévation de pression osmotique plasmatique était également postulée pour rendre compte des décharges posthypophysaires d'hormone antidiurétique et du contrôle de la réabsorption rénale d'eau. L'administration intracarotidienne ou intrahypothalamique de solutions hypertoniques de NaCl a permis de démontrer, par les réponses de prises d'eau déclenchées, que les osmocepteurs de la soif sont localisés dans l' hypothalamus (B. Andersson, E. M. Blass et A. N. Epstein, 1970 ; ). Ainsi, après injection dans l'hypothalamus médian de 0,01 ml d'une solution de NaCl à 2 p. 100, une chèvre, préalablement rassasiée, boit jusqu'à 6 litres d'eau en une heure (Andersson, 1953, 1955). Le recueil des décharges de neurones hypothalamiques en réponse à de telles injections a confirmé cette localisation (B. A. Cross et J. D. Green, 1959 ; D. Novin, 1962 ; C. McBrooks, S. Nicolaïdis, 1969).
Les variations du volume sanguin (volémie) sont enregistrées par des récepteurs qui permettent la régulation de la pression artérielle. Les agents humoraux impliqués dans le contrôle de celle-ci (facteur atrial natriurétique, angiotensine, aldostérone) interviennent également dans l'induction de l'éveil central de soif. L'angiotensine, à très faible dose dans l'hypothalamus, déclenche le comportement de soif (Epstein et Fitzsimons, 1970).
Des expériences de lésions localisées et de stimulations électriques ou chimiques dans le système nerveux central ont permis d'identifier les circuits neuronaux mis en action par les systèmes détecteurs. Il a été confirmé, après une étude initiale de D. G. Montemurro et J. A. F. Stevenson (1955-1956), qu'une lésion de la région latérale de l'hypothalamus induit une adipsie irréversible. Le stimulus osmotique et le stimulus hypovolémique deviennent inefficaces à provoquer la soif et la prise d'eau. L'animal meurt de déshydratation, malgré la disponibilité de l'eau à laquelle il ne touche pas. En revanche, la stimulation électrique de cette région, ou son autostimulation par le rat lui-même, entraîne une polydipsie considérable (G. J. Mogenson, 1966). Des lésions dans la région latérale préoptique produisent, contrairement à la lésion latérale hypothalamique, une adipsie limitée à l'action du stimulus osmotique. Ce fait confirme, au niveau des centres, la distinction de deux soifs (Blass et Epstein, 1971). D'autres lésions hypothalamiques provoquent des polydipsies. Celles-ci sont, dans le cas du diabète insipide expérimental, de simples conséquences secondaires de la polyurie. D'autres polydipsies, dans lesquelles ce mécanisme est exclu, ne permettent pas d'identifier un centre de la satiété hydrique. Les stimulations chimiques intrahypothalamiques ont montré l'existence d'un système interconnecté de neurones limbiques et diencéphaliques (N. E. Miller, 1962 ; S. P. Grossman, 1964, S. Nicolaïdis, 1989).
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Écrit par
- Jacques LE MAGNEN : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur de laboratoire à l'École pratique des hautes études
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