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SONDAGES D'OPINION

Une légitimité en débats

Sondages et politique

Profil social des électorats - crédits : Encyclopædia Universalis France

Profil social des électorats

En prétendant dire l'opinion publique, les sondages participent aux profits et aux risques de la politique : ils y gagnent des succès ou subissent des revers et deviennent une cible récurrente des critiques. La politique est leur vitrine. Chaque nouvelle élection offre une nouvelle épreuve dont la visibilité et le suspense assurent une inestimable publicité. Les « intentions de vote » sont pourtant d'autant plus problématiques que les sondages sont effectués à distance du scrutin. Y a-t-il des intentions de vote plusieurs années avant une élection quand les candidats ne sont même pas connus ? Malgré l'invitation à se mettre dans la situation d'une élection, les sondés expriment plutôt des préférences pour des personnalités politiques indépendamment d'une élection, en tout cas différemment d'une même interrogation à la veille d'une élection réelle. Par ailleurs, quand ils s'adressent à des électeurs après leur vote comme les sondages « sortie des urnes », les sondages électoraux ne mesurent pas seulement des opinions. Les sondés sont alors invités à répondre sur un comportement réel et récent. Ce sont les sondages les plus utiles aux analyses électorales car ils permettent d'entrer dans la boîte noire du vote secret et de faire des corrélations inaccessibles à l'examen des résultats électoraux et de la cartographie électorale : vote des hommes et des femmes, vote par tranche d'âge, vote selon les catégories sociales.

Les sondages électoraux ne sont qu'une variété des sondages politiques même si la perspective électorale est rarement absente de ces derniers. Les instituts de sondages présentent des mesures continues de l'opinion à travers des baromètres qui évaluent les « cotes de popularité », les « cotes de confiance », les « indices de satisfaction », ou « d'avenir » de leaders qui sont le plus souvent attentifs à ces signes malgré des fluctuations ou des écarts entre baromètres. Les événements saillants de l'actualité politique donnent en outre matière à des sondages ad hoc.

Connaître les résultats des votes par avance ne conduit-il pas à voter différemment ? La question était d'autant plus cruciale que certains accusaient les sondages de fausser le jeu démocratique tandis que les sondeurs réfutaient une telle idée. On tenta donc de vérifier les hypothèses d'une influence en faveur des « vainqueurs » (bandwagon) ou des « vaincus » (underdog) annoncés. En comparant des populations différentes à cet égard comme celles de l'Est et de l'Ouest des États-Unis, il fut impossible d'établir que les électeurs votant après les premiers dépouillements et résultats partiels connus de la côte est votaient différemment de ceux qui avaient voté avant. Après d'autres vaines tentatives, la piste fut abandonnée. L'inquiétude subsista pourtant dans de nombreux partis politiques.

Par précaution, certains pays adoptèrent une législation. En France, la loi du 19 juillet 1977 interdit la publication des sondages électoraux dans la semaine précédant un scrutin. À l'époque, les sondages laissaient augurer une victoire de l'opposition aux élections législatives de 1978. Or les élus de la majorité croyaient qu'une telle annonce contribuerait à faire advenir leur défaite en soufflant l'espoir dans l'opposition et en répandant la résignation dans leurs propres rangs. Les sondages eux-mêmes ne furent pas interdits avant les élections mais seulement leur publication dans la semaine précédant un scrutin ; une instance de contrôle fut créée sous la forme de la Commission de contrôle des sondages composée de hauts fonctionnaires et de sondeurs. Quoiqu'elle fût une œuvre de compromis, la loi de 1977 a été critiquée de manière rituelle par les sondeurs. Au nom de principes démocratiques,[...]

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