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SOPHISME

Transcription du grec sophisma, désigne l'artifice de langage dont usait le sophiste de l'Antiquité, le raisonnement trompeur ou embarrassant pour l'interlocuteur, l'argumentation fallacieuse, voire la faute de raisonnement. Primitivement, c'est le tour d'adresse ingénieux, la prestidigitation habile dans l'ordre du langage : on n'y voit que du feu ; le raisonnement paraît valide, bien que sa conclusion soit inacceptable, mais on ne sait déceler la faille. C'est ainsi que Platon, dans le dialogue intitulé l'Euthydème, classe sous la rubrique des divertissements, farces et attrapes, les propos suivants : « Quels sont ceux qui apprennent ? Ceux qui savent, ou ceux qui ne savent pas ? Ceux qui savent n'ont pas besoin d'apprendre, mais comment ceux qui ne savent pas sauraient-ils reconnaître ce qu'il leur faut apprendre ? » Il dit encore : « Désirer que Clinias devienne sage, c'est souhaiter qu'il ne soit plus ce qu'il est, donc désirer sa mort. » « Parlant de choses mauvaises, les hommes de bien disent des choses mauvaises, s'il est vrai qu'ils les disent comme elles se comportent. » Citons enfin la thèse sophistique, énoncée par Gorgias et par Protagoras, de l'impossibilité du discours faux : « Dire, c'est dire quelque chose, c'est donc dire ce qui est. » Il faut ou bien que toute énonciation soit vraie, ou bien qu'il n'y ait pas d'énonciation. On a quitté là le domaine du divertissement pour celui de la mise en question des propriétés du langage. Le sophisme doit être pris au sérieux comme le montre P. Aubenque à propos de la signification.

Après Platon et Aristote apparaissent des sophismes d'un autre genre, qui méritent aussi bien de s'appeler « paradoxes » ou « antinomies ». Ils visent à créer un embarras, à susciter une réflexion ; parfois ils s'intègrent dans une polémique plus vaste. Ainsi le sorite : demander si un tas de blé reste encore un tas quand on en enlève un grain ; après avoir obtenu l'assentiment de l'interlocuteur, réitérer la question jusqu'à ce qu'il ne reste plus qu'un seul grain, qui, en vertu de la majeure accordée, sera encore un tas. De même, est-on chauve pour perdre un cheveu ? Ce type d'argument fut utilisé par les probabilistes pour combattre le dogme stoïcien du critérium absolu de la certitude. Autre exemple, celui d'Anaxagore, qui caricature le syllogisme : « La neige est de l'eau gelée ; or l'eau est noire, donc la neige est noire. » Il en est de même dans l'un des quatre paradoxes concernant le mouvement, ou plutôt l'impossibilité du mouvement, de Zénon d'Élée : Achille et la tortue ; si la tortue est partie la première, Achille ne la rattrape pas, car il lui reste — c'est ce qu'on demande à l'interlocuteur d'accorder — à parcourir toujours la moitié de la distance qui les sépare, et la moitié de cette moitié, etc., à l'infini. Sous une forme plaisante est posée la question de la divisibilité de l'espace physique au regard de la divisibilité à l'infini de l'espace géométrique. L'exemple d'Épiménide le Crétois qui dit « tous les Crétois sont menteurs », repris et simplifié par Montaigne sous la forme « je mens », appartient aussi au genre du paradoxe. Devant ces propos, deux types de réactions se sont produits : d'une part, la réaction du sens commun, celle de Diogène le Cynique, à qui l'on propose l'argument contre l'existence du mouvement, et qui garde le silence et se met à marcher ; c'est celle des sceptiques (« c'est en prenant appui sur les opinions communes relatives à la manière de vivre que nous évitons des arguments trompeurs de cette sorte ») ; d'un autre côté, la réaction des logiciens, qui, comme Russell,[...]

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Écrit par

  • : agrégée de l'Université, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Rennes

Classification

Autres références

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    • 257 mots

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