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SŌTATSU NONOMURA (XVIIe s.)

Sōtatsu-hōkyō

En 1630, Sōtatsu se consacra aux copies du Saigyō monogatari (histoire des errances du poète Saigyō, 1118-1190, à travers la campagne japonaise), d'après des rouleaux du xvie siècle. Ces copies avaient été commandées par un membre de l'aristocratie, Karasumaru Mitsuhiro, qui, écrivant le colophon, mentionne l'artiste Sōtatsu-hōkyō (hōkyō, « pont de la loi », vieux titre ecclésiastique décerné par la cour, depuis l'époque Heian, aux peintres de talent).

Sōtatsu avait peut-être reçu ce titre à la suite de la décoration de Yōgen-in, petit sanctuaire rebâti en 1621 par la femme du Shōgun Hidetada, en mémoire de son père Asai Nagamasa. L'artiste orna de motifs animaliers huit shitomi (portes à glissières en bois). Parmi ces motifs, les deux lions traités de face, le corps ondulant en une torsion violente, emplissent presque tout l'espace et semblent jaillir du fond laissé nu, à l'exception de quelques rehauts dorés qui jouent sur les veines du bois. La vigueur de ces représentations n'est pas dépourvue d'un certain humour, humour qui reste sous-jacent dans l'œuvre de Sōtatsu. Outre ces décors animaliers, douze portes à glissières s'ornent de rochers et de pins. La composition y est encore malhabile. L'auteur semble peu habitué à traiter les grandes surfaces, mais ses progrès seront rapides et l'empereur Go-Mizunoo lui commandera, en 1630, trois paravents dont un à décor de pins.

Sōtatsu est, à cette époque, en pleine possession de son talent, ayant acquis sa maîtrise grâce à de nombreuses études à l' encre où il paraît s'être inspiré de la technique de Muqi et de Sesshū. L'artiste inventa peut-être alors le tarashikomi, procédé qui consiste à asperger d'eau les touches d'encre fraîchement posées pour en obtenir des taches en dégradées, technique que l'on retrouve ensuite dans ses peintures en couleurs souvent superposées pour former des harmonies imprévues.

Dès lors se succèdent les grandes compositions, dont la plus ancienne, selon le professeur Yamane, serait la représentation des danses de bugaku que conserve le Daigo-ji. Cinq danses anciennes y sont représentées, balancées dans le coin supérieur de droite par un tronc d'arbre moussu et dans la partie inférieure de gauche par l'évocation des grands tambours traités dans un style encore un peu minutieux. Les danseurs semblent semés sur le fond doré, mais leurs groupements utilisant magistralement l'espace sont reliés par les arabesques de leurs traînes.

Viendront ensuite les deux paravents Seki-ya et Miotsukushi, deux épisodes du Genji monogatari évoqués de façon grandiose. Il ne s'agit plus ici de l'art narratif et des miniatures de l'époque Heian, mais de compositions imposantes où les couleurs posées en aplats modèlent les formes et se combinent avec un usage savant du vide. Compositions majestueuses également que ces évocations, dans les deux paravents de la Freer Gallery de Washington, du paysage de Matsushima, site célèbre du Japon : les flots agités entourent les îlots rocheux modelés par les couleurs, tandis qu'un banc de sable fin, bordé de brun et d'argent, évoque un détail d'un des mikaeshi des Heike no kyō.

Les Dieux du Vent et du Tonnerre, au Kennin-ji, forment une sorte d'apothéose dans la production artistique de Sōtatsu. Le thème, emprunté au Kitano-tenjin engi (e-makimono du xiie s.), fut souvent repris par Sōtatsu et par son atelier dans divers éventails. Mais, ici, l'artiste a su hausser le thème d'une miniature à la grandeur d'un art décoratif puissant et mouvementé. Les divinités sont disposées aux deux extrémités du paravent laissant entre elles un large espace vide qu'animent l'écharpe agitée par la brise du dieu du Vent et le sac qui se gonfle au-dessus de la tête à la chevelure hérissée et rehaussée[...]

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Écrit par

  • : ancien maître de recherche au CNRS, professeure honoraire à l'École du Louvre, chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet

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Autres références

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