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SOUK

Le mot souk viendrait de l'araméen shūkā, avec le sens primitif de rue, puis celui de marché. On le trouve dans la composition de nombreux toponymes. Très tôt, ce terme recouvre différents types de centres d'activité commerciale dans le Proche-Orient et au Maghreb. On distingue les foires annuelles, les marchés ruraux hebdomadaires et les souks urbains permanents. Le terme souk remplace aussi celui de mawsim pour désigner la foire annuelle associée à une fête ou un pèlerinage religieux. À l'aube de l'islam, il existait dans la péninsule arabique un peu plus d'une vingtaine de marchés annuels de ce type, dont les plus connus sont ceux de Badr, Dhū'l-Madjaz, Madjānna et surtout Okāz. Il s'agit d'agglomérations modestes se trouvant en terrain neutre et qui prenaient une importance particulière lors des fêtes religieuses annuelles. Lorsque La Mecque parvint à la primauté religieuse et économique, ces places tombèrent à l'abandon. Les aswāk al-‘arab, les « souks des Arabes », sont des marchés ruraux de l'époque du Prophète. Le souk rural est un marché itinérant hebdomadaire auquel se rendent les paysans en une demi-journée de marche ; il se tient en zone agricole, le plus souvent sur un terrain non cultivé, d'où le nom de sūk al-ghubār (marché à la poussière). Dans le choix du lieu intervient la densité de la population et la présence d'une eau pérenne suffisante pour les hommes et les bêtes. Dans le bassin méditerranéen, ces conditions sont réunies aux pieds des montagnes.

L'expansion de l'islam apporte de nombreux changements et impose sur l'aire étendue de son nouveau domaine le souk musulman, qui n'est nullement le continuateur des souks de La Mecque ou de Médine, mais dont il utilise la technique commerciale, apanage des Qurayshites. Dans les cités antiques qu'ils occupent, les musulmans conservent les institutions préexistantes, le marché l'emporte sur la place publique, le développement du quartier artisanal et commerçant fait du souk le prolongement du quartier spécialisé de la ville hellénistique. Les portiques des grandes avenues à colonnades furent rapidement envahis par des boutiques, généralement deux par entrecolonnement, des échoppes ne tardèrent pas à s'élever au milieu de la chaussée. Ayant cessé d'être des artères de grande circulation, ces voies déterminent avec les rues adjacentes des secteurs commerciaux occupés par divers souks spécialisés. Ceux-ci constituent désormais une véritable « cité marchande ».

En ville, le mot souk recouvre plusieurs types particuliers de marchés. Dans les premières cités musulmanes (amsār) qui n'étaient, à l'origine, que des camps militaires, on n'avait pas prévu la place du marché. Le grand marché se tenait au terminus des routes caravanières au mirbād, endroit où l'on déchargeait les chameaux, à Basra et, à Kūfa, au Kunāsa, vastes places que l'on peut assimiler à des marchés ruraux.

Du marché cyclique on passe au souk permanent polyvalent qui se développe à l'intérieur des centres urbains. Ce type de souk permet les échanges de marchandises entre Bédouins, campagnards et citadins sur des postes fixes. Le souvenir du marché rural se maintient dans le marché aux bestiaux qui se tient périodiquement aux portes de la ville.

Nous trouvons à Bagdad un intéressant exemple d'évolution des souks urbains en milieu purement musulman. La capitale abbāsside fut construite en 762 par al-Mansūr au lieu-dit sūk Baghdād où se tenait une foire annuelle. À l'origine, il y eut des souks sous les arcades (taqāt) des larges rues qui partaient des quatre portes vers le centre de la ville ronde, puis le calife chassa les marchands de la cité et fonda, au sud, le quartier d'al-Karkh pour les marchés et les entrepôts. Plus tard, lorsque la ville[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Lyon

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