Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SPARTE

Les derniers soubresauts

Sparte est assez insensée pour ne pas participer avec les autres Grecs à la lutte contre Philippe II de Macédoine. Elle n'en est pas épargnée pour autant : le roi dévaste la Laconie, la réduit à la vallée de l'Eurotas et morcelle le Péloponnèse pour la ruiner définitivement. Sous Alexandre, elle se rebelle vainement.

L'époque hellénistique voit s'accroître son déclin. L'orgueilleuse cité qui ne comptait pour son salut que sur la bravoure de ses soldats doit, en 317, se ceindre de remparts, qu'elle ne cessera de renforcer. Ses ennemis d'antan, les Arcadiens et Argos, montrent une grande énergie contre elle. Elle s'acharne en vain à susciter des coalitions contre une Macédoine dont les forces sont sans proportion avec les siennes.

Parallèlement, la crise interne s'amplifie. Malgré le maintien apparent de ses institutions, Sparte n'est guère différente des autres cités de Grèce : le nombre de ses citoyens diminue au détriment de sa puissance militaire, tandis qu'augmente celui des inférieurs misérablement endettés ; la terre se concentre en quelques mains ; d'immenses fortunes voisinent avec la plus extrême pauvreté.

Cependant, le poids d'un passé si glorieux suscite de grandes ambitions chez des rois qui vont se poser en réformateurs. Agis IV annule les dettes et médite un plus vaste programme social, mais il périt assassiné. Cléomènès III va plus loin : il abolit les dettes, partage la terre en quatre mille lots, fait entrer des inférieurs et des périèques dans le corps civique, autorise des hilotes à racheter leur liberté. Il reconstitue la puissance militaire de Sparte et remporte de grands succès dans le Péloponnèse ; mais il est vaincu à la bataille de Sellasie (222) où il s'oppose à la coalition de la ligue achéenne et de la Macédoine. Son œuvre est reprise dans un sens plus radical encore par le tyran Nabis ; mais Sparte n'a plus la force de lutter contre ses ennemis, auxquels Rome apporte un soutien décisif : le meurtre de Nabis par les Étoliens met un terme à ces tentatives de réforme, inspirées au moins partiellement par la doctrine stoïcienne, et qui trouvèrent un vif appui dans l'élément populaire. Le triomphe de Rome, bientôt définitif, est aussi celui des nantis contre les revendications des déshérités. Au reste, c'est la fin de Sparte et, même si elle occupe une situation exceptionnelle dans la Grèce conquise, puisqu'elle conserve en théorie sa liberté et son autonomie, elle ne vit plus que de ses souvenirs sous la dure tutelle des vainqueurs.

Un retour en arrière s'impose, si l'on ne veut commettre l'injustice de ne juger Sparte que sur sa décomposition ultime. Sparte est un des deux pôles de l'hellénisme. Sur les bords de l'Eurotas est née une sagesse politique, faite de méfiance envers les décisions passionnées de la multitude, et qui a enthousiasmé maints Athéniens, sensibles au « mirage spartiate ». Cette sagesse politique se doublait d'une sagesse humaine, qui à la mollesse préférait l'effort, à l'individualisme sans frein le dévouement à la chose publique, à la recherche des voluptés la maîtrise de soi. On a beaucoup brodé sur ce double thème et l'on a vu se multiplier les apophtegmes lacédémoniens, tels ceux que rapporte Plutarque, où les Spartiates, purs et durs, devenaient comme les ancêtres spirituels des grands Romains des premiers temps. Mais il y a une vérité derrière ces broderies convenues, une vérité qu'exprime bien ce passage où Thucydide (1, 84) fait définir au roi Archidamos II la nature profonde des Lacédémoniens : « Nous devons à notre bon ordre deux qualités : la vertu guerrière et le discernement ; la première, parce que le sentiment de l'honneur tient de près à la sagesse, et la valeur à la crainte du déshonneur ; le discernement, d'autre part, à cause de notre formation : celle-ci ne nous donne pas[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Média

Grèce : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Grèce : carte administrative

Autres références

  • ACHÉMÉNIDES

    • Écrit par
    • 3 164 mots
    • 3 médias
    ...perdre sa suprématie maritime. Les satrapes financent la flotte spartiate et récupèrent quantité de villes helléniques d'Asie enlevées aux Athéniens. Mais Sparte, qui se sent pour cela déconsidérée aux yeux de l'opinion grecque, se montre une alliée incommode. Le satrape Tissapherne juge plus sage de pratiquer...
  • ALCIBIADE (450-404 av. J.-C.)

    • Écrit par
    • 2 023 mots
    ...entre dans la carrière politique, la guerre du Péloponnèse connaît une trêve et Athènes traverse une brillante période. Nicias a signé la paix avec Sparte en 421 : cette paix, Alcibiade ne l'accepte pas. Il prépare la revanche d'Athènes. Il veut la guerre qui peut ouvrir à son ambition un champ illimité....
  • ARGOS

    • Écrit par
    • 325 mots
    • 1 média

    Cité grecque du nord-est du Péloponnèse, l'un des sites les plus anciennement occupés de la région, puisqu'on y trouve des traces d'un établissement dès le premier âge du bronze. Argos fut aux ~ xive et ~ xiiie siècles un des centres de la civilisation mycénienne et, dans...

  • CIMON (apr. 510-450 av. J.-C.)

    • Écrit par
    • 640 mots

    Homme d'État athénien, fils de Miltiade, le vainqueur de Marathon. Après une jeunesse difficile, Cimon combat à Salamine (~ 480) et participe à l'expédition navale de ~ 478, qui voit le commandement des Grecs sur mer passer des Spartiates aux Athéniens. Aussitôt après la constitution de...

  • Afficher les 22 références