SPIN ou MOMENT CINÉTIQUE ou ANGULAIRE INTRINSÈQUE
On appelle « spin » le moment angulaire ou cinétique intrinsèque des particules quantiques ou quantons. Ce terme anglais évoque le mouvement de rotation propre que peuvent posséder les objets physiques, telles les planètes ou les balles de tennis, qui tournent sur eux-mêmes tout en décrivant leurs trajectoires. Il est caractérisé par une grandeur physique adéquate, appelée le moment angulaire intrinsèque ; celle-ci a un double rôle : d'une part, elle caractérise un mouvement propre de l'objet, un « degré de liberté » autonome ; d'autre part, elle entre dans l'évaluation du moment angulaire total du système physique dont fait partie l'objet considéré, moment angulaire total qui obéit à l'une de ces importantes et précieuses lois de conservation cinématiques gouvernant tout phénomène physique. Cette loi de conservation du moment angulaire est intimement associée à l'invariance des lois physiques par rotation.
Dans le cadre de la théorie quantique, l'idée géométrique et mécanique de mouvement de rotation propre perd sa signification intuitive, mais la notion de moment angulaire intrinsèque garde sa validité et son double rôle.
Le spin est donc un moment angulaire quantique, et, comme tel, il est soumis aux règles spécifiques qui régissent cette grandeur par suite de l'incompatibilité (non-commutativité) de ses composantes. Ainsi, le module du vecteur spin, c'est-à-dire sa longueur, prend-elle une valeur s(s + 1)ℏ, où ℏ est la constante quantique (ℏ = h/2π, où h est la constante de Planck) et s est un nombre entier (0, 1, 2, ...) ou demi-entier (1/2, 3/2, ...) ; on dira alors couramment par abus de langage que le spin « vaut s ». L'incompatibilité des composantes ne permet ensuite d'en spécifier qu'une à la fois. Les valeurs possibles de celle-ci sont quantifiées, discrètes, et de la forme mℏ, où m est l'une des (2s + 1) valeurs − s, − s + 1, ..., s − 1, s. On peut dire qu'un spin s est susceptible de prendre (2s + 1) « orientations » possibles – en comprenant bien que ce mot ne se réfère ici qu'à la projection du vecteur spin sur un seul axe. La valeur m de la projection (en unité ℏ) est entière ou demi-entière comme s, et la multiplicité des orientations (soit 2s + 1) est impaire ou paire selon le cas. Ainsi, l'électron, de spin 1/2, est-il susceptible de posséder deux états de spin.
Il existe une profonde relation entre le caractère entier et demi-entier du spin d'un quanton et le comportement collectif d'un ensemble de tels quantons identiques. C'est ce qu'on appelle, un peu abusivement, la « connexion spin-statistique » : les quantons de spin entier sont des bosons et les quantons de spin demi-entier sont des fermions. Par là, le spin, grandeur quantique d'échelle microphysique de l'ordre de ℏ ≃ 10-34 S I, a un effet majeur sur le monde macroscopique. Outre ces effets, de nature essentiellement cinématique, indépendants des interactions mises en jeu, le spin intervient également dans la dynamique des processus quantiques. Propriété structurale des quantons, il conditionne les mécanismes de leurs couplages interactifs. Le cas le plus simple, et d'une grande importance, est celui des interactions électromagnétiques. Les quantons soumis à ces interactions possèdent un moment magnétique colinéaire à leur spin, ce qui donne à ce dernier un rôle dynamique crucial dans les phénomènes électromagnétiques, par exemple l'effet d'un champ magnétique sur les spectres atomiques – effet Zeeman – ou sur le mouvement d'un jet atomique – expérience de Stern-Gerlach.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean-Marc LÉVY-LEBLOND : professeur émérite à l'université de Nice
Classification
Média
Autres références
-
HADRONS
- Écrit par Bernard PIRE
- 4 223 mots
- 2 médias
Les baryons sont par définition les hadrons qui ont un spin demi-entier. On leur associe un « nombre baryonique » B égal à 1 ou à — 1 selon qu'il s'agit d'une particule ou d'une antiparticule et on constate que toutes les réactions conservent ce nombre, c'est-à-dire que dans toute réaction observée... -
PARTICULES ÉLÉMENTAIRES
- Écrit par Maurice JACOB et Bernard PIRE
- 8 172 mots
- 12 médias
Le spin est le moment angulaire du constituant : celui-ci tourne sur lui-même. Il s'agit d'un mouvement quantique, le moment angulaire se mesurant en unités de ℏ (où ℏ est la constante de Planck h, divisée par 2π). Quarks et leptons ont tous un spin 1/2, ou un moment angulaire ℏ... -
ATOME
- Écrit par José LEITE LOPES
- 9 140 mots
- 13 médias
...dans lesquels les quatre nombres quantiques de deux électrons coïncident n'existent pas. Et il a alors donné comme un postulat fondamental pour les électrons, et toutes les particules à spin 1/2, l'énoncé suivant : deux électrons quelconques ne peuvent jamais occuper le même état quantique. -
ATOMIQUE PHYSIQUE
- Écrit par Philippe BOUYER et Georges LÉVI
- 6 651 mots
- 1 média
...vers le noyau. Il y a également des corrections dues à ce que l'électron possède comme propriété intrinsèque, en plus de sa masse et de sa charge, un spin s = 1/2. Cette propriété correspond au fait que le moment magnétique de l'électron ne peut prendre que deux orientations possibles dans un champ magnétique.... - Afficher les 37 références