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SPIRITUALISME

Caractérisé plus par une convergence d'inspiration que par le ralliement à un système, le spiritualisme désigne, au sens général, toute doctrine reconnaissant à la fois l'autonomie et la supériorité de l'esprit. De ce point de vue, l'élan dominant de la métaphysique occidentale depuis Anaxagore exprime cette tendance. De même, le spiritualisme peut apparaître comme la formulation philosophique d'une aspiration présente dans toutes les grandes religions.

Cependant, le mot « spiritualisme » (qui a d'abord été utilisé péjorativement pour désigner un abus de spiritualité) a un sens plus précis qui correspond à son emploi, principalement en France, depuis le début du xxe siècle, par des philosophes qui, à l'instar de Maine de Biran et de Victor Cousin, cherchent à réagir simultanément contre le matérialisme du xviiie siècle et contre l'idéalisme allemand. D'après eux, le premier réduit le supérieur à l'inférieur, le second pèche par excès de généralisation et d'abstraction : l'esprit doit être considéré comme un principe vivant. C'est dans cette perspective que se situe la prédiction faite par Ravaisson dans son célèbre rapport sur La Philosophie en France au XIXe siècle : « À bien des signes, il est [...] permis de prévoir comme peu éloignée une époque philosophique dont le caractère général serait la prédominance de ce qu'on pourrait appeler un réalisme ou positivisme spiritualiste, ayant pour principe générateur la conscience que l'esprit prend en lui-même d'une existence dont il reconnaît que toute autre existence dérive et dépend, et qui n'est autre que son action. »

La principale illustration de ce « positivisme spiritualiste » devait être l'œuvre de Bergson dont la quête expérimentale de l'unité entre la conscience et la vie a connu un si grand succès dans les premières décennies du siècle.

Si, aujourd'hui, devant la progression technologique, la montée des sciences humaines et la violence des conflits politico-idéologiques, l'influence du spiritualisme philosophique est en déclin, peut-on nier que l'exigence la plus instante demeure, pour l'humanité, celle de la promotion spirituelle ?

L'origine grecque

Il est courant, et justifié, de voir en Platon le fondateur de l'idéalisme. Le spiritualisme, en raison sans doute de ses ambiguïtés, a beaucoup plus de mal à identifier ses origines. En réalité, cette doctrine comme telle n'existait pas en Grèce. Tout au plus peut-on en découvrir les germes, lorsque la pensée hellénique – avec Anaxagore – se détache de la physis pour établir un principe spirituel autonome, lorsque avec Socrate s'éveille la conscience morale et, surtout, lorsque Aristote subordonne les phénomènes, selon le degré de leur actualisation, au principe suprême qui est à la fois vie, pensée de la pensée et effectivité pure. Il est significatif qu'un retour à Aristote – dont l'Essai sur la métaphysique d'Aristote de Ravaisson est le plus remarquable témoignage – ait soutenu au xixe siècle l'instauration spiritualiste. On sait que, pour Aristote, l'idée platonicienne ne suffit pas à expliquer le mouvement : la vie, en ses étagements, suppose davantage qu'une dialectique des essences, elle exige la réalisation d'une finalité dont vibre toute la nature. Cette souple liaison entre les réalités biologiques et leur couronnement spirituel, aussi bien dans la nature qu'en l'homme (avec la théorie des trois âmes), sera le modèle privilégié du spiritualisme ravaissonien.

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