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SPOERRI DANIEL ISAAC FEINSTEIN dit DANIEL (1930- )

<it>Déjeuner sous l'herbe</it>, D. Spoerri - crédits : D. Gliksman/ Inrap

Déjeuner sous l'herbe, D. Spoerri

Tour à tour premier danseur à l'Opéra de Berne, metteur en scène d'avant-garde de La Cantatrice chauve d'Eugène Ionesco en 1955, du Désir attrapé par la queue de Picasso en 1956 (dans des décors d'Otto Tschumi et des costumes de Meret Oppenheim) et du Cœur à gaz de Tristan Tzara (1972), Daniel Spoerri est né à Galaţi en Roumanie d'un père juif assassiné par les nazis et d'une mère originaire de Suisse, pays où il réussit à s'établir en 1942. Cet artiste et théoricien des moins conventionnels, inscrit la force singulière de sa démarche dans une dénonciation violente de l'esthétisme abstrait, du beau matériau. Il prône avec une imagination féconde la participation du public, il souligne l'importance du précaire, des objets de la vie quotidienne et du hasard qui préside au fonctionnement du réel. Assistant, en 1957, au Landestheater de Darmstadt, il fonde la même année la revue Material dont la présentation audacieuse comportant des lacunes invite le lecteur à compléter l'effort de création de l'auteur. Poète concret, il est aussi le créateur, avec Tinguely, de l'« autothéâtre » au Hessenhuis d'Anvers, dans lequel il demande au spectateur d'être à la fois acteur et public, et rejoint ainsi les tentatives d'environnement et les happenings d'Allan Kaprow aux États-Unis. Fondateur à Paris, en 1959, de l'édition MAT (Multiplication d'art transformable), Spoerri est un des premiers à éditer des œuvres signées par des artistes en renom, dévalorisant ainsi la notion d'œuvre d'art unique et irremplaçable. Membre du groupe des nouveaux réalistes depuis 1960, il est l'auteur de célèbres Tableaux-Pièges, dont la formule consiste à fixer sur leurs supports des objets en désordre, en particulier des reliefs de repas, et à les dresser verticalement munis de l'estampille « Attention ! œuvre d'art ! » Intégrant dans l'espace des éléments rigoureusement antipicturaux, Spoerri se borne, non sans agressivité et provocation, à prendre et à exposer les objets usés par la consommation. Et il développe, sur les principes des « tableaux-pièges », la série des « détrompe-l'œil », dans lesquels le support est un tableau réaliste, des « multiplicateurs d'art » où, grâce à un jeu complexe de miroirs, les objets piégés se répètent à l'infini. Jouant non sans humour et poésie avec le langage, il crée ses « pièges à mots », à moins qu'il ne demande aux rats qui hantent les caves des galeries de participer avec lui à la destruction des objets, faisant intervenir ainsi le morbide et l'idée de la mort. À Düsseldorf, il est cuisinier du restaurant-galerie qu'il a ouvert en 1968. Spoerri refuse de séparer l'activité artistique des préoccupations alimentaires et veut élargir la conscience du consommateur en mobilisant tous ses sens, la vue, l'odorat, le toucher, avant de l'inviter à piéger les restes de son repas, « cet acte, cette seule décision : pétrifier le monde autour de soi », écrit Alain Jouffroy (Révolution du regard, Paris, 1964), « qui fait prendre conscience aujourd'hui que la totalité du monde est à réinventer, si l'on ne veut pas qu'elle nous transforme elle-même en objets ». Un « musée de reliques fétichistes d'art », Le Musée sentimental, commence sa carrière en 1977 au Centre Georges-Pompidou, des objets ayant appartenu à des artistes y sont exposés, ainsi qu'à Cologne en 1979 et à Bâle en 1989. Dans les années 1980, il coule dans le bronze des ensembles d'objets autour du thème du corps humain : Corps en morceaux (Raab Galerie, Berlin, 1991) et Le Cabinet anatomique (Centre d'art et de plaisanterie, Montbéliard et Musée de l'Assistance publique, Paris, 1994). Une sélection importante de ses œuvres relevant[...]

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<it>Déjeuner sous l'herbe</it>, D. Spoerri - crédits : D. Gliksman/ Inrap

Déjeuner sous l'herbe, D. Spoerri

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