SPORT L'année 2008
Jeux Olympiques d'été : le triomphe chinois
Les Jeux de Pékin ont vu le triomphe de la Chine sur tous les plans – diplomatique, politique, sportif. Alors que, en mars 2008, la répression féroce par les autorités de Pékin des manifestations tibétaines à Lhassa avait engendré une éphémère mobilisation internationale, laissant augurer sinon le boycottage des Jeux, du moins quelques mouvements d'humeur venus des hommes politiques, des organisations de défense des droits de l'homme ou des sportifs eux-mêmes, la Chine a remporté une grande victoire diplomatique dès le 8 août : quatre-vingt-dix chefs d'État – un nombre record, quatre fois plus qu'à Athènes en 2004 – assistèrent à la cérémonie d'ouverture magnifiquement orchestrée par Zhang Yimou. Succès politique également : le silence des défenseurs des droits de l'homme durant la période des Jeux fut assourdissant et aucun sportif n'esquissa le moindre geste contestataire à Pékin ; si bien que, au lendemain des Jeux, on pouvait lire dans le Beijing Youth Daily que, « grâce à l'organisation sans faille des Jeux de Pékin et à l'atmosphère conviviale, l'image d'un grand pays nouveau est apparue au reste de la planète ». La Chine a en effet proposé une manifestation à l'échelle de sa démesure (40 milliards d'euros investis en infrastructures), avec trois joyaux architecturaux : le « nid d'oiseau », théâtre des compétitions d'athlétisme, le « cube d'eau », où s'illustrèrent les nageurs, la tour de télévision, un camaïeu de couleurs d'une infinie beauté. En outre, une armada de volontaires (plus de 100 000) contribua à une organisation impeccable. Des stades pleins, des sites ultramodernes, une logistique infaillible, une avalanche de messages emplis de bons sentiments, il n'a donc rien manqué pour satisfaire le Comité international olympique (C.I.O.), les sportifs des deux cent quatre délégations nationales engagées et les médias. Seule ombre au tableau : si le public chinois s'est montré enthousiaste sur les sites, il a été sciemment tenu à l'écart des réjouissances annexes. Quel héritage restera-t-il vraiment de ces Jeux pour la Chine et les Chinois une fois que l'image de la flamme olympique aura disparu des mémoires ? Plus qu'en ce brillant mois d'août, ce sera peut-être à ce moment-là que l'Empire du Milieu aura réellement rendez-vous avec l'histoire... Durant la cérémonie de clôture, Jacques Rogge indiqua que « ce furent des Jeux vraiment exceptionnels ». Certes, mais ce furent sans doute les derniers de ce format. Sebastian Coe, le maître d'œuvre des Jeux de 2012 à Londres, a clairement indiqué que la capitale britannique misera sur moins de gigantisme et plus de modestie, car, même avant l'éclatement de la crise financière mondiale, son pays ne disposait pas des moyens nécessaires pour égaler Pékin. Il espère redonner un peu de chaleur et d'insouciance au rendez-vous olympique.
Enfin, sans surprise, la Chine s'est imposée comme la première puissance sportive mondiale : avec 51 médailles d'or et 100 médailles au total (contre 32 médailles d'or et 63 médailles au total en 2004), elle détrône les États-Unis, lesquels, avec 36 médailles d'or et 110 médailles au total, font pourtant mieux qu'à Athènes (35 médailles d'or, 103 médailles au total). Et la domination chinoise pourrait durer longtemps, puisqu'on considère généralement que le travail de fond entrepris à l'occasion d'une olympiade continue de porter ses fruits durant une décennie. Hégémonique ou presque dans ses disciplines de prédilection (gymnastique, haltérophilie, plongeon, tennis de table, badminton, tir), la Chine a effectué une percée notable en boxe, en lutte, glané sa première[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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