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- 2. Cyclisme : nouvelle donne ou trompe-l’œil ?
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SPORT L'année 2014
Cyclisme : nouvelle donne ou trompe-l’œil ?
L’ analyse de la saison 2014 – notamment les résultats du Tour de France et l’approche de certains coureurs vis-à-vis de celui-ci – peut laisser penser qu’on assiste à une nouvelle donne pour le sport cycliste. Déjà, sur la Grande Boucle, aucun contrôle antidopage ne s’est révélé positif : sachons néanmoins raison garder, un passé récent et douloureux venant prouver que cela ne signifie nullement que le dopage ait disparu du peloton ; en outre, en fin d’année, on apprenait que la formation kazakhe Astana (celle de Vincenzo Nibali, lui-même étant totalement hors de cause) se trouvait au cœur d’une grave affaire de dopage. Ensuite, la victoire de l’Italien Vincenzo Nibali, certes facilitée par les abandons sur chute des deux favoris annoncés, le Britannique Christopher Froome et l’Espagnol Alberto Contador, et la présence de deux Français sur le podium marquent le retour au premier plan de deux pays à forte tradition cycliste : aucun Italien n’avait gagné le Tour depuis Marco Pantani, en 1998 ; pour trouver deux coureurs français sur le podium, il faut remonter à 1984, quand Laurent Fignon s’était imposé devant Bernard Hinault. Le succès de Nibali semble s’inscrire dans une nouvelle logique, marquée par la fin des hégémonies d’un coureur sur la Grande Boucle et par le fait que le Tour ne constitue plus, pour certains champions, l’objectif unique de leur année. Ainsi, depuis 2008, aucun coureur n’a remporté deux fois le Tour. En outre, Nibali n’axe pas sa carrière sur le seul Tour de France : il est présent du début à la fin de la saison ; il peut se fixer un autre challenge (par exemple, en 2013, il décida de préparer en priorité le Giro, qu’il remporta, et renonça à participer au Tour). Il en va de même du Colombien Nairo Quintana, deuxième du Tour en 2013, qui avait annoncé dès la fin de celui-ci qu’il se consacrerait en 2014 prioritairement au Giro – qu’il a gagné – et ne se trouverait pas au départ du Tour.
Par ailleurs, les journalistes comme le public ont applaudi aux performances des Français sur la Grande Boucle : Jean-Christophe Peraud, deuxième, Thibaut Pinot, troisième, le résultat est inespéré. Peut-on pour autant penser qu’un Français gagnera la Grande Boucle dans un futur proche ? La réponse ne va pas de soi. Si on se contente de se pencher sur le Tour 2014 pour réfléchir à la question, la réponse est négative : Nibali a devancé ses dauphins de plus de 7 minutes ; personne n’a jamais pensé que son maillot jaune puisse être mis en danger. Concernant Jean-Christophe Peraud, son âge (37 ans) valorise l’exploit, mais il indique aussi qu’il a sans doute atteint son maximum. Thibaut Pinot comme Romain Bardet, sixième à Paris, ont tous les deux vingt-quatre ans et sont de solides espoirs. Néanmoins, pour espérer se vêtir de jaune à Paris, il leur faudra progresser nettement dans l’exercice du contre-la-montre (Nibali, qui n’est pas un vrai spécialiste, les a largement dominés dans le seul contre-la-montre du Tour) et, surtout, apprendre à gérer la course en leader d’équipe, afin d’éviter de perdre du temps dans une « cassure » anodine, comme Pinot du côté de Reims, ou de céder beaucoup de terrain lors d’un « jour sans », comme Bardet dans le Port de Balès… En revanche, l’approche sur le long terme des instances françaises peut laisser espérer une réponse positive. Déjà, après l’affaire Festina (1998), la France a la première pris le problème du dopage à bras-le-corps, et les sponsors n’exigent pas des victoires à tout prix pour pérenniser leur engagement dans le cyclisme. Ensuite, les entraîneurs sont de mieux en mieux formés et proposent des préparations fondées plus sur le qualitatif que sur le quantitatif. Enfin, la jeune génération, « connectée », se montre très réceptive aux nouvelles méthodes de travail.[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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Médias