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PRUSINER STANLEY B. (1942- )

Neurologue américain. Alors que la crise de la vache folle n'était pas encore retombée, le soixante-seizième prix Nobel de physiologie ou médecine a été attribué en octobre 1997 à Stanley Prusiner, auteur de la seule théorie proposée à ce jour pour rendre compte d'un certain nombre de particularités, et notamment de la transmissibilité des encéphalopathies spongiformes, maladies neurologiques fatales touchant l'homme et divers mammifères supérieurs.

C'est en 1972, après la mort de l'un de ses patients atteint de maladie de Creutzfeldt-Jakob, que Prusiner commence ses travaux. Toutes les encéphalopathies spongiformes se caractérisent par des dépôts d'une protéine dite prion dans le cerveau des malades. Mais la question étiologique est difficile, puisque l'on connaît des formes familiales de ces maladies aussi bien que des cas sporadiques. Dans les premières, l'existence de mutations du gène codant la protéine prion sera démontrée dans les familles atteintes. Dans les secondes, un agent infectieux sera mis en cause par Carleton Gajdusek chez des indigènes de Nouvelle-Guinée frappés d'une encéphalopathie spécifique, le kuru. L'hypothèse infectieuse de Gajdusek, qui lui vaudra le prix Nobel en 1976, se confirmera malheureusement dans le courant des années 1980 avec la contamination accidentelle de patients traités par hormone de croissance extraite d'hypophyses de sujets infectés. Toutefois, faute d'avoir identifié l'agent, on n'évoque encore qu'un infra-virus.

Prusiner, lui, a proposé que la protéine prion soit elle-même l'agent infectieux. La transmissibilité de la maladie de Creutzfeldt-Jakob par des extraits cérébraux débarrassés de tout ADN ou ARN ayant été démontrée expérimentalement chez l'animal, l'hypothèse d'un virus, agent contenant nécessairement un acide nucléique, devenait problématique. Des études structurales ayant par ailleurs révélé des différences de conformation tridimensionnelle entre la protéine prion retrouvée dans le cerveau de malades (organisée en feuillets bêta) et la protéine prion normale (organisée en hélices alpha), Prusiner a élaboré un modèle selon lequel la protéine anormale, lorsqu'elle infecte les cellules d'un autre organisme, peut convertir les protéines prions qui continuent d'être synthétisées en nouvelles protéines anormales. Comme celles-ci sont résistantes à la dégradation, le modèle rend effectivement compte de la multiplication et de l'accumulation de l'agent infectieux protéique dans le cerveau des malades.

Cette réplication post-traductionnelle d'une information purement conformationnelle est une notion nouvelle en biologie. Elle a d'ailleurs initialement valu à Prusiner l'opposition de la plupart de ses pairs. Aujourd'hui encore, le modèle comporte des lacunes : on comprend mal, notamment, par quel type d'interaction la protéine infectante peut « imprimer » sa structure anormale à la protéine cellulaire. Il reste qu'aucune autre explication n'a pu être avancée, et que la notion nouvelle introduite par Prusiner pourrait aider à comprendre, outre les encéphalopathies spongiformes, des affections neurodégénératives incomparablement plus répandues, telles que la maladie d'Alzheimer.

— Vincent BARGOIN

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  • DÉCOUVERTE DU PRION

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    • 365 mots

    On doit au neurologue américain Stanley Ben Prusiner (né le 28 mai 1942) la découverte d’une classe d'agents infectieux responsable de maladies neurodégératives, les prions. Sa publication princeps décrivant les prions paraît dans la revue Science en 1982. Cette mise au jour vaut...