STÈLES, Victor Segalen Fiche de lecture
Un livre-monument
Une telle minutie ne peut se concevoir sans une recherche équivalente d'ordre bibliophilique proche des préoccupations d'un Mallarmé. En s'inspirant particulièrement de la stèle nestorienne de Sian, Victor Segalen s'occupe lui-même, à Pékin, de l'édition du volume. Il paraît le 13 août 1912 et contient 48 poèmes. La seconde édition, publiée en 1914 aux éditions Crès, en comportera 64, chiffre correspondant au nombre d'hexagrammes du Yi King, Le Livre des mutations. Le format, « deux fois plus haut que large », devait homothétiquement refléter la stature de la stèle. Une couverture, faite de deux ais de bois de camphrier et maintenue par deux rubans de soie jaune enserre une unique feuille de papier impérial de Corée pliée en accordéon et imprimée d'un seul côté. La stèle n'a pas d'envers. Sur chaque page est tracé un rectangle simulant la table de pierre portant l'inscription. Le texte, inscrit de haut en bas, suspendu à son titre et à son épigraphe chinoise complète le parallèle entre le poème et l'inscription stélaire. Le recueil se décompose en six chapitres ou directions : « Les Stèles face au Midi » concernent les lois ou édits promulgués par l'empereur, « Les Stèles face au Nord » parlent d'amitié, « Les Stèles orientées » d'amour, « Les Stèles occidentées » de la guerre, « Les Stèles du bord du chemin » s'adressent aux voyageurs et « Les Stèles du Milieu » renvoient au Moi profond de chacun et à la Diversité. Plus méditatives que les autres, ces dernières, qui terminent le volume, marquent le lieu d'une métamorphose, d'un passage spirituel. Dans la géographie chinoise comme dans le recueil de poèmes, c'est le Milieu qui commande et unifie toutes les directions de l'espace intérieur et extérieur.
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Écrit par
- Yves KIRCHNER : écrivain
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