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KING STEPHEN EDWIN (1947- )

Un monde familier et perturbé

Créateur d’univers, Stephen King est passé maître dans l’art de dépeindre la montée vers ce que les Anglais nomment le « climax », l’apogée viscéral d’un récit. Il sait aussi renouveler en profondeur les thèmes et les figures traditionnels du fantastique et de la science-fiction. Ainsi du vampire dans Salem (1975), du revenant dans Simetierre (1983), ou encore de l’animal monstrueux (Cujo, 1981). Il fait intervenir dans son récit des objets maléfiques comme la voiture dans Christine (1983) ou Roadmaster (2002), le Polaroid du Molosse surgi du Soleil (1990), jouant sur les figures du diable (Bazaar, 1991), les rêves et les cauchemars tirés du quotidien. Dans Ça (1986), une présence maléfique empoisonne une communauté par son emprise délétère.

Parmi les thèmes de science-fiction intervient souvent la menace extraterrestre, qu’elle prenne la forme de l’asservissement dans Les Tommyknockers (1987), de la violence extrême dans Dreamcatcher (2001), ou qu’elle se matérialise dans les dévoreurs de temps des Langoliers (1990). On trouve aussi des fresques spectaculaires, comme dans Le Fléau (1990) : un virus échappé d'un laboratoire met en péril l'humanité entière.

Ces récits se déroulent dans des espaces connus de l'auteur, ceux du Maine, où il situe des villes imaginaires comme Castle Rock ou Derry. Comme pour ses modèles, Richard Matheson, Ray Bradbury, le fantastique n'est jamais si inquiétant que lorsqu’il émane d’objets ou de situations ordinaires comme l'arrêt du tabac (Desintox, Inc., 1978) ou le régime (La Peau sur les os, 1984, publié sous le nom de Richard Bachman). Il aborde aussi des problèmes de société comme dans La Ligne verte (1996), contre la peine de mort. Ce « folklore » du quotidien n'est pas rassurant pour autant. Le point de vue est souvent celui de l'adolescence, problématique sans forcément être horrible, marquée par la défiance devant le modèle de société proposé. L'apprentissage se fait de façon brutale. Le protagoniste hérite d'un don de nature psychique (voyance, télépathie, télékinésie, guérison par imposition des mains), aussi salvateur que néfaste (The Shining, 1977 ; Charlie, 1980 ; Dead Zone, 1979 ; Dreamcatcher, 2001), qui résulte d’une souffrance originelle ou de sa différence. Dès le premier roman, Carrie, confrontée à une mère démente, hérite d'un pouvoir qui traduit ce chaos adolescent. Ce n’est pas la mère qui est en cause, mais la religion qui asservit les adultes, tout comme le dieu télévision (Les Régulateurs, 1996, sous le nom de Richard Bachman) ou le portable transformant la population en zombies (Cellulaire, 2006). La résurgence de la mémoire oblitérée par un trauma d'enfance est à l’œuvre aussi bien dans Ça et Dreamcatcher que dans Docteur Sleep (2013). Pour surmonter sa souffrance, l'homme se réfugie dans l'alcool et la drogue (Revival, 2014). La femme se révèle plus forte : dans sa trilogie féminine, Stephen King montre des femmes victimes de perversions ou de violences conjugales, et capables d’une détermination à survivre qui force l'admiration :  Jessie (1992), Dolores Claiborne (1992), Rose Madder (1995).

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Écrit par

  • : professeur émérite de l'université d'Aix-Marseille-I

Classification

Média

Stephen King - crédits : Everett Collection/ Shutterstock.com

Stephen King

Autres références

  • ROMERO GEORGE ANDREWS (1940-2017)

    • Écrit par
    • 1 449 mots
    • 2 médias
    ...(1977), un adolescent éprouve le besoin de tuer pour boire le sang de ses victimes. Ce n'est pas un être surnaturel, mais un individu qui peine à s'intégrer. Romero travaille ensuite avec Stephen King sur le scénario de Creepshow (1982), une adaptation fidèle et humoristique de quelques bandes dessinées horrifiques...