FREARS STEPHEN (1941- )
Le nom du réalisateur britannique Stephen Frears reste attaché au film qui le révéla en 1985, My Beautiful Laundrette, une histoire d'amour entre un émigré pakistanais et un jeune anglais mêlé à une bande de fascistes, dans la Grande-Bretagne en crise de Margaret Thatcher. Tout en affrontant la réalité la plus dure (chômage, racisme, haine de l'homosexualité), Stephen Frears en livrait, sans démagogie, un violent contretype en montrant la réussite sociale de son couple d'amants, à la tête d'un petit commerce fleurissant (une laverie, en anglais laundrette). La réussite du film My Beautiful Laundrette imposa rapidement Frears comme la figure de proue d'un nouveau cinéma réaliste anglais. Le projet se Stephen Frears n'était pourtant pas si clairement définissable : de fait, œuvres personnelles et films de commande pour les studios américains dessinent une trajectoire plus complexe, qui mêle les succès et les échecs, commerciaux ou artistiques. Si le style du cinéaste souffre parfois d'une conformation anonyme aux genres (comme le western dans The Hi-Lo Country, 1999), il se singularise imparablement par une qualité dont My Beautiful Laundrette donna un des meilleurs exemples : un rapport intense et généreux aux personnages, un intérêt profond pour ce qui fait leur humanité.
Une œuvre disparate ?
Né en 1941 à Leicester, Stephen Frears fait ses études à la Gresham's School et à Trinity College. Il commence par travailler pour la télévision. Dans sa carrière, la place emblématique de My Beautiful Laundrette est d'ailleurs liée à la vitalité de la télévision anglaise, puisque le film fut produit par Channel Four avant d'être distribué au cinéma. Dans le sillage de Ken Loach, c'est en effet à la B.B.C. T.V. que Frears réalisa, au début des années 1970, ses premiers longs-métrages. Rarement montrés, ces films ont gagné au fil du temps une aura qui se confond avec celle de l'« âge d'or » de la télévision britannique. La réalité semble plus inégale, qui va du téléfilm étouffant d'académisme (Three Men in a Boat, 1975, d'après le roman de Jerome K. Jerome) à la fulgurante poésie urbaine de Bloody Kids (1979), qui propose une sorte de Guerre des boutons moderne. C'est sa rencontre avec l'écrivain Hanif Kureishi qui va momentanément entraîner Frears vers un cinéma d'intervention plus politique, faisant de Londres la capitale d'un terrible chaos social en même temps que d'un joyeux désordre sexuel (dans My Beautiful Laundrette comme dans Sammie et Rosie s'envoient en l'air, 1987). Même lorsqu'il reviendra à la plus authentique réalité du prolétariat (cette fois dans la banlieue de Dublin pour The Snapper, 1993, et The Van, 1996, adaptés de deux romans de Roddy Doyle), Frears saura échapper au piège du cinéma sociologique en filmant ses personnages avec une légèreté qui rend hommage à leur force de vie et à leur beauté morale.
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Écrit par
- Frédéric STRAUSS : journaliste
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