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HAYDEN STERLING (1916-1986)

Sterling Hayden appartient à cette race de « héros » de la mythologie cinématographique américaine qui nous a donné un Gary Cooper, un John Wayne, un Robert Ryan. Sa carrière d'acteur ne brille pas d'un éclat particulier (sur la cinquantaine de films qu'il a tournés, sept ou huit seulement émergent), il n'a jamais été – ni voulu être – une « star », aucun oscar ne lui a été décerné. Et, pourtant, il est peu de personnalités aussi attachantes, et à ce point frappées du sceau de la modernité, que celle de Sterling Hayden.

De son vrai nom John Hamilton (il troqua ce patronyme banal pour celui de Hayden, son beau-père ; mais peut-être est-ce là aussi une allusion, à une lettre près, au célèbre compositeur autrichien, auteur d'un de ces Concertos pour cor, qu'il admirait), il naît le 26 mars 1916, à Montclair, dans le New Jersey, d'une mère pianiste et d'un père agent de publicité. Sa jeunesse se passe à lire et à naviguer – deux passions qui le poursuivront toute sa vie. Il devait écrire dans son autobiographie Wanderer (1963) : « Je découvris que les livres et la mer avaient beaucoup en commun : ils distillent également le silence et la solitude. » Ses études à peine terminées (à la Brown and Nichols School de Cambridge, Mass.), Sterling Hayden s'engage à bord d'un bateau de pêche, le Maine. À dix-neuf ans, il s'offre son premier yacht, Horizon ; à vingt, il entreprend un premier tour du monde, comme second, et aborde à La Havane, dans les îles Galapagos, à Tahiti, où il songe un moment à se fixer ; à vingt-trois ans, il achète l'ancien navire de plaisance du Kaiser, l'Aldebaran, qui sera emporté peu après dans une tempête. Ce tempérament de bourlingueur ne le destine pas spécialement au cinéma. C'est par défi – ou pour payer ses dettes – qu'il se présente en 1940 à la Paramount, sur la recommandation d'un ami journaliste, Tom Horgan : à sa grande surprise, on lui signe aussitôt un contrat. Sa haute stature (1,93 m) impressionne, ses yeux bleus séduisent, quant à son dilettantisme affiché, on espère bien le canaliser. Sterling Hayden tourne un premier film, Virginia (1941), sous la direction d'un réalisateur de série B, Edward H. Griffith (sans aucun lien avec le grand D. W. Griffith). Les vedettes en sont Fred MacMurray et Madeleine Carroll, que Sterling Hayden épousera en 1942 ; leur union durera quatre ans. La presse le baptise « le grand Viking blond », et le compare à Clark Gable. Lors de l'entrée en guerre des États-Unis, il s'engage dans les parachutistes, puis participe à la campagne d'Égypte, dans les marines.

À partir de 1947, les films – et les croisières au long cours – se succèdent. Sterling forge son image de marque de truand au cœur tendre : un autre grand baroudeur de l'écran, John Huston, lui confie – contre le gré de ses producteurs – le rôle de Dix Handley, le tueur obsédé par ses souvenirs d'enfance, dans Asphalt Jungle (Quand la ville dort, 1950) ; Robert Wise en fait un paysan courbé sur sa terre et qui meurt à la tâche, dans So Big (Mon Grand, 1953, d'après le roman d'Edna Ferber) ; et surtout Nicholas Ray l'utilise comme héros archétype du néo-western, plus prompt à rêver qu'à dégainer, dans l'admirable Johnny Guitare (1954). Avec Joan Crawford, et en rupture ouverte avec les clichés en vigueur, il forme là un couple parmi les plus fascinants de l'écran. L'acteur n'est pas grisé par ces prestations, d'autant que des démêlés avec la commission MacCarthy (ancien adhérent du Parti communiste, il a fait amende honorable) l'ont rendu suspect aux yeux de l'establishment hollywoodien : pour la profession, il restera à jamais un marginal, voire un paria. Aussi bien, à la première occasion, Hayden largue les amarres et prend le large.[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur émérite à l'université de Paris-I, historien du cinéma

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