REICH STEVE (1936- )
Le compositeur américain Steve Reich apparaît comme le plus représentatif du courant musical – principalement américain – dit minimaliste, qui s’est formé au cours des années 1960. Dans le sillage de La Monte Young, il a créé, avec Terry Riley et Philip Glass, une alternative à l'avant-garde européenne en développant un style particulier qui favorise la continuité de la musique tonale. Ses expérimentations, parfois réalisées grâce à des artifices technologiques (bande magnétique, travail de studio, sampling...) sont toujours profondément pensées. D'un raffinement extrême, elles excluent toute facilité et toute démagogie. Néanmoins, sa musique reste d'une écoute et d'une efficacité immédiates, facilitées par un sens de l'émotion doublé d'une sensualité trop souvent absente de l'« autre » musique contemporaine, la musique atonale.
Une ascèse sophistiquée
Stephen Michael Reich naît le 3 octobre 1936 à New York. Adolescent, il s'intéresse au rythme et étudie les percussions avec Roland Kohloff, timbalier de l'Orchestre philharmonique de New York, ainsi qu'en écoutant les disques de John Coltrane et de Kenny Clarke. Diplômé de philosophie à la Cornell University, il étudie la composition avec Hall Overton (1957-1958), en privé, ainsi qu'avec Vincent Persichetti et William Bergsma à la Juilliard School of Music de New York (1958-1961) ; il se perfectionne au contact de Darius Milhaud et de Luciano Berio au Mills College d'Oakland, en Californie, jusqu'en 1963.
L'année 1964 apparaît comme décisive pour Steve Reich. Il s'agit en effet de l'année où La Monte Young et Terry Riley signent deux œuvres qui résonnent comme un manifeste du minimalisme : Young compose The Well-Tuned Piano, pour piano préparé ; In C, de Riley, est créé le 4 novembre au Tape Music Center de San Francisco, dont le compositeur est un des membres fondateurs. Steve Reich, ainsi que les compositeurs Jon Gibson, Pauline Oliveros et Morton Subotnick figurent parmi les interprètes de la première de In C.
Les œuvres de jeunesse de Steve Reich laissent entrevoir, derrière le dépouillement et l'austérité, une idée fortement orientée sur la pulsation et la répétition de motifs. Apparaît également la technique du déphasage, consistant en un décalage dans le temps d'une voix par rapport à une autre, contrepoint générateur d'effets saisissants, canon virtuel ou encore glissement contrôlé. Le Reich des débuts ne pense pas vraiment à l'harmonie et à la mélodie. Ces « études » montrent l'ascétisme d'une démarche authentique et profonde. It'sGonna Rain (1965) et Come Out (1966) résultent de l'action de magnétophones mis en boucle, répétant à l'infini le même fragment de phrase, de manière à contrôler, à organiser minutieusement le temps musical ; le plus petit écart de vitesse de l'un par rapport à l'autre induit le fameux effet de déphasage.
Au début des années 1970, Steve Reich, comme d'autres musiciens – en particulier Philip Glass, avec lequel il partage de nombreux points communs –, est contraint, afin de diffuser ses compositions, de fonder son propre ensemble, le Steve Reich and Musicians. Four Organs(1970), pour quatre orgues électriques et maracas, va lui donner l'occasion de rencontrer un public plus large, séduit par un sens motorique envoûtant. Poursuivant avec logique l'orientation de ses débuts, Steve Reich part étudier à l'université d'Accra, au Ghana, les secrets de la musique africaine, fondée principalement sur les percussions. Il en résulte le merveilleux Drumming – pour huit petits tambours accordés, trois marimbas, trois glockenspiels, une flûte piccolo et deux voix de femme, créé au musée d'Art moderne de New York le 3 décembre 1971 –, qui ne donne pas une musique faussement[...]
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Écrit par
- Patrick WIKLACZ : journaliste
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