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STRATON DE LAMPSAQUE (env. 330-env. 270 av. J.-C.)

Philosophe péripatéticien. Également surnommé le Physicien. Disciple de Théophraste, Straton succéda à ce dernier comme chef de file du Lycée, position qu'il occupa pendant dix-huit ans. Il fut sans doute, pendant un temps, le précepteur de Ptolémée II Philadelphe et jouit de la protection d'Arsinoé, sœur et épouse du souverain. Il joua un rôle important dans l'implantation de la science grecque à Alexandrie. Son œuvre, considérable (quarante-quatre titres connus), ne nous est malheureusement parvenue que sous la forme de quelques fragments provenant tous d'ouvrages de seconde main. Elle touche à des domaines aussi variés que la logique, l'éthique, la politique, la physique (qui inclut à cette époque la physique proprement dite, la métaphysique, la psychologie et la physiologie), l'histoire et la correspondance personnelle.

L'analogie de beaucoup de ses titres avec ceux d'Aristote et de Théophraste montre qu'il se situe en général dans la ligne de l'école péripatéticienne. Mais il est un domaine où il prend à bien des égards le contre-pied de l'aristotélisme : c'est celui de la physique. Son surnom provient moins de l'importance relative de la physique dans son œuvre que de l'originalité qu'il a su montrer dans ce domaine par sa doctrine et surtout par sa méthode. Dans ses traités logiques, Straton applique, contrairement à Aristote, la notion de continuité au temps et à l'espace. Pour lui, le temps n'est pas quantifiable ; il n'est que « la mesure du mouvement et du repos » par laquelle l'esprit perçoit toutes choses ; on est frappé par l'aspect moderne de ce relativisme. Relativisme encore quand Straton, contre Aristote, affirme que les formes, comme les objets, sont soumises au changement. La physique de Straton n'est pas totalement mécaniste : comme Aristote, il rejette l'atomisme de Démocrite et affirme que les corps peuvent être divisés à l'infini ; il conserve la notion de qualité, sans la réduire comme Démocrite à un agencement quantitatif de mouvements ; parmi ces qualités universelles, une importance particulière est attachée à la pesanteur, à la chaleur et au froid. Mais, et là Straton s'écarte d'Aristote, la légèreté n'est pas considérée comme une qualité distincte : pour Aristote, les éléments lourds (la terre, l'eau) sont attirés par nature vers le sol et les éléments légers (l'air, le feu) sont rejetés par nature vers les hauteurs. Selon Straton, au contraire, les éléments légers ne le sont que parce que les éléments les plus lourds les empêchent de tomber comme leur nature l'exigerait.

L'esprit empirique de Straton s'oppose ainsi au dualisme a priori d'Aristote. Mais, surtout, Straton refuse tout recours à la transcendance : les qualités générales agissent par l'intermédiaire des facultés (dunameis) propres à chaque corps. L'idée aristotélicienne du premier moteur et, par là, toute explication téléologique sont ainsi abandonnées : ici, Straton se rapproche de Démocrite. Contrairement encore à Aristote, Straton accepte la notion de vide. La matière, selon lui, recèle d'innombrables et minuscules parcelles de vide dont l'abondance relative détermine le poids des différents corps. Sa théorie du vide lui permet de donner une explication naturelle de nombreux phénomènes physiques, tels que la chute des corps, la transmission de la chaleur, le magnétisme ou la compression de l'air. Mais c'est surtout sa méthode qui manifeste l'originalité de Straton ; elle consiste à montrer et à vérifier par des expériences concrètes qu'on ne peut refuser la notion de vide sans rendre inexplicables des phénomènes courants, perceptibles à chacun. Cet empirisme rigoureux ne sera égalé dans toute l'Antiquité que par [...]

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Écrit par

  • : diplômé d'études supérieures de grec, licencié en langue et littérature hébraïques, collaborateur à l'Institut de recherche et d'histoire des textes, C.N.R.S.

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