STYLE INTERNATIONAL, architecture
La notion de style international qui couvre une aire fort large de l'architecture du xxe siècle, est contenue dans Internationale Architektur, panorama de l'architecture établi en 1924 par Gropius. Elle a été explicitée en 1932, sinon effectivement fondée à la suite d'une suggestion d'Alfred Barr, alors directeur du Museum of Modern Art de New York dans l'ouvrage de Henry Russel Hitchcock et de Philip Johnson : The International Style Architecture Since 1922, à l'occasion de la première Exposition internationale d'architecture moderne organisée, précisément, au Museum of Modern Art de New York et où Le Corbusier, Gropius, Oud et Mies van der Rohe furent présentés comme les initiateurs et les guides de la nouvelle architecture. Après avoir ainsi désigné l'architecture des années 1920-1930, c'est-à-dire celles qui voient se former et s'agencer les éléments d'un nouveau langage, elle a ensuite, par extension et malgré les controverses qu'elle suscite, été utilisée pour identifier globalement l'architecture des années 1930-1950 (H. R. Hitchcock, « The International Style Twenty Years After », in Architectural Record, vol. CX, 1952).
Au niveau théorique, le style international du premier demi-siècle apparaît comme une résultante des positions rationalistes incorporées à la culture américaine après 1933 (fuite devant le nazisme et fixation aux États-Unis des animateurs du Bauhaus), introduites en Amérique du Sud par les disciples de Le Corbusier (Costa, Niemeyer, Reidy, Moreira), au Japon et au Moyen-Orient par des épigones de Le Corbusier (Maekawa, Wogenscky), des élèves du Bauhaus (Mizutani, Yamawaki) et des adeptes du Werkbund (Kishida, Sato, Yoshida), et des tendances classiques du Bauhaus, du Stijl et de l'Esprit nouveau. Au niveau pratique, le style international est un corollaire de l'essor technologique (normalisation, standardisation des composantes du bâtiment, béton armé, voile de béton, ossature d'acier, mur-rideau). Au niveau socio-économique, il est marqué par le développement (souvent anarchique) de la construction en hauteur, conséquence de la croissance de la bureaucratie capitaliste, de la spéculation foncière, de la coagulation urbaine. Il est aussi, au niveau sémiologique, la résultante de l'adoption (à l'échelle mondiale) de procédés constructifs identiques (unification des codes syntaxiques), de la généralisation d'usages, de la diffusion de modèles culturels analogues (appauvrissement des codes sémantiques) : conséquences du développement, de la multiplication et de la rapidité des moyens de communication autant que de l'extension universelle des mass media.
En dernière analyse, on dirait du style international, tel qu'il a marqué les produits majeurs de l'architecture mondiale entre les années 1920 et 1950, qu'il met en présence d'une architecture du besoin. Architecture du désir aussi, c'est-à-dire architecture anthropologique, architecture de la clarté, l'architecture moderne de style international écarte les épaisseurs sémantiques de l'architecture ambiguë ou pluraliste, productrice d'œuvres complexes, contradictoires, sombres, éclatantes et mystérieuses, celles-là mêmes qui ponctuent les tensions maniéristes, baroques, rococo, modern style. Bref, la pauvreté sémantique de l'architecture technocratique du xxe siècle (cela sans nier les trouvailles poétiques qui sauvent, par exemple, les grandes œuvres de Le Corbusier) tient essentiellement au fait qu'elle a été conçue et traitée comme fait physique (priorité à l'« acte de bâtir »), comme fait spatial et sensible (esthétique) en termes de fonctionnements et non comme fait ethnique, non comme phénomène de communication entre les hommes.
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Écrit par
- Robert L. DELEVOY : directeur de l'École nationale supérieure d'architecture et des arts visuels, Bruxelles
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