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STYLISATION, art

Le terme de stylisation, dont l'usage reste souvent fort vague, désignait à l'origine le caractère incisif et précis de la forme imprimée par le stylet.

Les historiens d'art emploient fréquemment le mot pour désigner assez indistinctement toute démarche réductrice ou simplificatrice de la forme en fonction de critères fort variables : tantôt le traitement simplificateur est imposé par le formalisme conceptuel de l'idéogramme ou du schéma, tantôt il est le résultat d'une recherche esthétique de type linéaire. Ces deux aspects de la stylisation en sont les formes extrêmes.

Entre elles se déploient toutes les variations de la représentation qui font de l'histoire de l'art une histoire progressivement réductrice des redondances au profit de la suggestion, de l'élision, en un mot d'une économie. L'essentiel est là : tout usage du terme de stylisation renvoie à une conception économique de l'esthétique, à une évaluation quantitative des stimuli employés. Dans une telle perspective, il semble que cette évaluation trouve ses critères dans une typologie des messages que les œuvres, ou plus généralement les objets, « veulent » émettre.

Dans le cas des simplifications idéographiques, on a affaire à une réduction codifiée des formes qui conduira à l'écriture (cependant, le passage de l'idéogramme à l'alphabet ne saurait être assimilé à un seul processus de stylisation, car au principe de l'économie se joint celui de la combinatoire qui lui est étranger).

C'est une tout autre démarche qui semble présider au dépouillement linéaire des fresques rupestres ou au schématisme des dessins d'enfants. L'hypothèse de E. H. Gombrich, Meditation on a Hobby Horse and Others Essays, Londres, 1961, est séduisante : il voit dans de telles réductions de la représentation à quelques traits essentiels une intention purement fonctionnelle. Si l'enfant chevauche un manche à balai c'est que l'objet investi présente les caractères nécessaires et suffisants à la chevauchée imaginaire qu'il éprouve le besoin d'organiser. Le « primitif » trace les figures du bison ou de l'antilope dans une perspective magique. L'image ici encore déploie son pouvoir visuel au-delà de la vision, dans l'effroi ou le désir.

La stylisation revêt alors un caractère opératoire selon les principes d'économie et de substitution de la magie. Trace conceptuelle ou trace magique, dans les deux exemples précédents le critère reste celui de l'adéquation à la fonction, lisibilité ou/et puissance. La forme, dans ces cas-là, assure la liaison entre le monde sensible et le monde intelligible, ou plus généralement entre le réel et l'imaginaire.

C'est un tout autre traitement qui sous-tend la stylisation linéaire d'une esthétique de la pléthore. Si l'on examine les formes du modern style d'un point de vue économique, on est frappé par leur équivocité ou leur polysémie. Ainsi lorsqu'une courbe, dans l'élégance d'un fléchissement, se fait simultanément tige, femme et serpent et qu'elle se justifie finalement par l'usage qu'on fait d'une rampe ou d'un collier, alors la stylisation devient une véritable idéologie graphique. On serait tenté de comparer un pareil processus à celui que Freud désigne comme la surdétermination dans le rêve. Inversement, dans les exemples qui précédaient, l'analogie serait plutôt à faire avec le processus de condensation. Quoi qu'il en soit, toute réflexion sur la stylisation a pour effet essentiel de mettre l'accent sur l'exigence en matière d'esthétique d'une réflexion quantitative selon différents choix économiques.

— Marie-José MONDZAIN-BAUDINET

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