DEMIREL SÜLEYMAN (1924-2015)
Homme politique turc, il fut Premier ministre à plusieurs reprises des années 1960 aux années 1990, avant d’être président de la République de 1993 à 2000.
Né à Islamköy dans la région d'Isparta (sud du plateau anatolien), au sein d'une famille de paysans aisés, Süleyman Demirel obtient son diplôme d'ingénieur en hydraulique en 1949 à Istanbul, puis bénéficie d'une bourse américaine pour étudier aux États-Unis. Rentré en Turquie, il est nommé, à trente et un ans, à la tête des Travaux publics, où son activité débordante lui vaut le surnom de « roi des barrages ».
Après le coup d'État militaire du 27 mai 1960 qui renverse le gouvernement d'Adnan Menderes, dont il est le protégé, Demirel se fait homme d'affaires ; il y réussit fort bien en très peu de temps comme ingénieur-conseil et représentant de sociétés étrangères.
Toujours aussi actif, il se lance simultanément dans la politique au sein du Parti de la Justice (P.J.), qui succède au Parti démocrate, dissous en 1960. Inconnu du grand public, il crée la surprise en se faisant élire en 1964 à la présidence du P.J. Il bénéficie du soutien des amis d'Adnan Menderes et des milieux d'affaires qu'il a fréquentés au sein de la franc-maçonnerie turque. Il fait ses classes politiques en tant que vice-Premier ministre dans le gouvernement de transition de Suat Hayri Urgüplü de février à octobre 1965. Sous sa direction, le P.J. obtient, aux élections d'octobre 1965, la majorité absolue au Parlement, en dépit du système proportionnel, spécialement façonné pour morceler les suffrages. Il triomphe : il est l'homme de la grande bourgeoisie et des Américains.
Mais, aussitôt après, les difficultés commencent pour lui : une partie des classes privilégiées qui le soutiennent se détourne de lui ; il doit faire face à la gauche qui augmente son audience, à l'agitation estudiantine dans les universités et à des relations sociales détériorées. Il emporte les élections de 1969, mais avec beaucoup moins de suffrages qu'en 1965. Peu après, l'aile droite de son parti fait scission. Sa position personnelle est affaiblie par les scandales financiers auxquels sont mêlés ses frères. L'émeute ouvrière de juin 1970 inquiète terriblement les milieux d'affaires. Abandonné par ces derniers, qui ne croient plus à son aptitude à gouverner, il est forcé à démissionner par les chefs de l'armée, le 12 mars 1971. Il contrôle toujours le P.J. et revient peu à peu au premier plan, mais il perd les élections d'octobre 1973.
Après le bref intermède du gouvernement de Bülent Ecevit (janvier-septembre 1974), Demirel s'emploie à constituer une coalition des partis de droite, appelée le Front national. Le libéral des années 1960 a changé. Sur le plan économique il reste le partisan de la libre entreprise, mais sur le plan politique il adopte la manière forte. Il se rapproche du Parti d'action nationale du colonel Alparslan Türkes, dont les commandos bien armés et entraînés lui fournissent une force de frappe redoutable. Le gouvernement du Front national, constitué en avril 1975 après six mois d'efforts, mène une politique électoraliste qui ruine l'économie et pratique une politique de force et d'intimidation à l'égard de l'opposition et des syndicats. Demirel réussit à faire accepter l'organisation d'élections anticipées, le 5 juin 1977, à un moment qu'il a choisi, ce qui lui permettra de limiter l'avance du Parti républicain du peuple (C.H.P.). Celui-ci ne réussit pas à obtenir la majorité absolue tandis que le P.J., bien que second, derrière le C.H.P., augmente considérablement ses suffrages au détriment de ses partenaires au sein de la coalition, sauf le parti fasciste de Türkes dont le nombre des députés passe de trois à seize. Devant l'échec de Bülent Ecevit à former un gouvernement de coalition, le Front[...]
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Écrit par
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: politologue, essayiste, directeur de la revue
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Classification
Médias
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